Jeudi, septembre 11, 2025

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Changer d’administration municipale à tout prix, vraiment?

Une mauvaise règle stable vaut-elle mieux qu’un bon changement précaire?

La discussion est partie d’un ami qui expliquait pourquoi, malgré ses désaccords avec le maire actuel, il ne serait pas malheureux si la population décidait de le garder en place. Son raisonnement tenait à son implication dans une entreprise de développement immobilier. Pour lui, l’enjeu n’était pas tant l’idéologie que la stabilité. C’est une discussion intéressante dans le cadre des élections municipales à venir.

L’impact du changement

En matière d’urbanisme, chaque changement de cap politique force les promoteurs à tout reprendre à zéro : refaire des plans, convaincre de nouveaux élus, investir en lobbying ou en rencontres explicatives… C’est coûteux, et ça peut facilement retarder un projet de deux ans avant que l’équilibre ne revienne. Autrement dit : une mauvaise règle stable vaut souvent mieux qu’une succession de nouvelles règles qui s’entrechoquent.

Le problème, c’est que nous avons centralisé à outrance la planification urbaine. On l’a politisée. On a fait en sorte que chaque nouvelle administration municipale puisse remettre les compteurs à zéro. Et quand tout passe par la volonté d’un élu ou d’un comité, chaque alternance devient synonyme de blocage. Résultat : à chaque élection où une nouvelle administration est élue, un nouveau maire consacre le quart de son mandat à prendre connaissance des dossiers et à établir une stratégie. Pendant ce temps, la ville tourne au ralenti — et les projets citoyens ou privés aussi.

Alors, comment éviter de choisir entre l’immobilisme d’une mauvaise règle stable et le chaos d’une instabilité constante?

1. Simplifier le cadre réglementaire

La première solution, c’est de revoir complètement l’approche réglementaire. Nos règlements d’urbanisme sont devenus des labyrinthes, rédigés comme si chaque rue devait être planifiée depuis l’hôtel de ville. Résultat : trop de détails, trop de rigidité, et un pouvoir discrétionnaire énorme laissé aux élus.

À l’inverse, une réglementation simple et claire permet aux projets de s’adapter aux réalités sans avoir à quémander une dérogation à chaque coin de rue. Plus de zonage mixte, moins de compartimentation. Si un quartier peut accueillir à la fois des commerces, du résidentiel et des services, on réduit les délais et on permet à la ville de respirer.

2. Redonner le pouvoir aux citoyens du quartier

Une ville, ce n’est pas seulement son maire, c’est surtout ses habitants. Or, trop souvent, on fait comme si le citoyen devait attendre passivement que le promoteur passe par les élus pour avoir son mot à dire. Mauvaise idée.

Il faudrait plutôt inverser la logique : obliger les promoteurs à consulter directement les gens concernés par un projet. Pas une consultation symbolique organisée par la ville un jeudi soir dans un sous-sol d’église. Non. Des rencontres réelles, régulières, avec les résidents du secteur.

Les frères Trudel, à Québec, ont montré que ça fonctionne. Ils ont obtenu l’acceptabilité sociale non pas en passant par la bureaucratie municipale, mais en parlant directement aux gens. Quand le citoyen se sent écouté et pris au sérieux, il devient un partenaire plutôt qu’un obstacle.

3. Décentraliser les décisions

Tant que l’on continuera à concentrer l’urbanisme entre les mains d’un petit cercle d’élus et de fonctionnaires, on sera prisonnier du cycle électoral. La solution, c’est de décentraliser : donner plus de place aux arrondissements, aux comités locaux, aux regroupements citoyens.

Si une bonne partie des décisions peut être prise à l’échelle du quartier, l’alternance à la mairie aura beaucoup moins d’effet paralysant. On réduit le coût politique des élections et on rend les projets plus résilients.

4. Valoriser l’opposition citoyenne

Changer de maire, ça fait partie du jeu démocratique. Et parfois, c’est nécessaire. Mais pour éviter que chaque nouveau maire se comporte comme un roi fraîchement couronné, il faut une opposition forte. Pas seulement à l’hôtel de ville, mais aussi dans la population.

Une opposition citoyenne vigilante peut limiter les dérives, questionner les choix douteux et rappeler que l’urbanisme n’est pas une chasse gardée politique. On a tous en tête l’image d’une Pierrette bien organisée, accompagnée de sa Georgette, qui ne lâche pas le morceau au conseil municipal. C’est ce genre de vigilance qui force les élus à rester prudents et à ne pas céder à leurs élans de power trip.

5. Remettre le citoyen au centre

Au fond, tout revient à cette idée : l’urbanisme n’appartient ni aux promoteurs, ni aux élus, ni aux fonctionnaires. Il appartient aux citoyens qui vivent la ville au quotidien. Plus on décentralise, plus on simplifie, plus on crée d’espaces de dialogue direct, moins on dépend du bon vouloir d’un maire ou d’un changement de garde.

Des nuances sont toutefois de mise

Dans le contexte actuel de crise du logement, nous avons eu une discussion avec Gabriel Giguère, de l’Institut économique de Montréal, dans le cadre du podcast Les Trois Afueras.

Au cours de la discussion, nous en sommes venus à parler du cas du Japon, qui a établi une norme nationale en matière de zonage. Ils ont décrété, at large, un dézonage massif et une simplification des normes d’urbanisme.

Et force est d’admettre que ça a connu un certain succès. Il coûte moins cher de vivre à Tokyo qu’à Montréal. En comptant l’ensemble de la région métropolitaine de Tokyo, il y a presque plus de gens qui y vivent qu’il n’y a d’habitants au Canada dans son entièreté. Et ça coûte tout de même moins cher de s’y loger.

Ce cas empirique me pousse à me questionner. Est-ce que je préfère une décentralisation des pouvoirs ou une décision unilatérale de simplifier le zonage et les normes urbanistiques, afin de permettre aux villes de réellement se concentrer sur ce qui fait partie de leur mandat, comme le traitement des eaux?

Honnêtement, ma réponse n’est pas encore définitive.

En conclusion

Une déréglementation intelligente et une incitation pour les entreprises et les habitants à se parler directement permettraient de réduire drastiquement le coût d’un changement d’administration municipale. On protège ainsi la démocratie, en permettant l’alternance sans paralyser la ville. Et surtout, on redonne à l’urbanisme ce qu’il n’aurait jamais dû perdre : son ancrage dans la vie réelle des gens.

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Francis Hamelin
Francis Hamelin
Francis Hamelin, #MakeThePLQLiberalAgain, est membre des Trois Afueras et écrivain amateur. Technicien en génie mécanique et industriel, il s'intéresse particulièrement aux politiques publiques, l'économie et à la productivité des entreprises et des individus.

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