Jeudi, octobre 2, 2025

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Legault copie les conservateurs : « Nos idées rentrent à pleine porte »

Éric Duhaime affiche un sourire en coin au lendemain du discours d’ouverture de François Legault. Contrairement aux autres chefs de l’opposition qui ont critiqué le premier ministre, le chef conservateur applaudit et se déclare « plutôt satisfait » du virage annoncé. La raison? Les idées conservatrices qu’il défend depuis des années semblent enfin pénétrer l’Assemblée nationale.

« Si on ne peut pas entrer physiquement à l’intérieur des murs de l’Assemblée nationale, nos idées, elles, rentrent à pleine porte », lance-t-il avec satisfaction. Un constat embarrassant pour la CAQ : ce virage conservateur à un an des élections semble davantage motivé par les sondages catastrophiques que par une réelle conviction.

Un réveil électoral à minuit moins cinq

Le chef du PCQ ne mâche pas ses mots en décrivant le revirement caquiste. Il rappelle que Legault promettait exactement les mêmes réformes en 2018 — réduction de la bureaucratie, accélération des projets économiques, transparence syndicale — mais que « pendant sept ans, la gestion a été tout autre ». Aujourd’hui, à un an du scrutin et au quatrième rang dans les sondages, le gouvernement « se réveille » et tente de « réajuster beaucoup le tir à la lumière des sondages ».

Pour Duhaime, il s’agit d’un « discours électoral » plutôt que d’« actions concrètes d’un gouvernement ». Il souligne que ces réformes ne se font pas « à la dernière minute » et ne peuvent être accomplies en six mois : « Ils arrivent à minuit moins cinq ».

La saga syndicale : déjà vu en 2019

L’histoire se répète, selon Duhaime. Il affirme qu’en 2019, un an après l’élection de la CAQ, le bureau de Legault l’a contacté suite à la publication de son essai « Libérez-nous des syndicats! » paru en 2013. Le gouvernement aurait voulu aller de l’avant avec une modernisation du syndicalisme et il aurait même rencontré le sondeur du parti pour élaborer des consultations publiques.

Toutefois, le bureau du premier ministre dément catégoriquement cette version des faits. « C’est totalement faux », a écrit le directeur des communications Ewan Sauves au Journal de Québec. Qu’importe la vérité sur ces rencontres, une chose est certaine : aucun projet de loi n’a été déposé. Six ans plus tard, Legault ressort exactement le même discours. « Avant de les croire, il va falloir le voir », prévient le chef conservateur.

Duhaime avertit que s’attaquer aux syndicats entraînera forcément « beaucoup de bruit », « beaucoup d’opposition » et « beaucoup de manifestations » de la part des organisations syndicales. La question demeure : le gouvernement aura-t-il le courage d’aller jusqu’au bout cette fois-ci?

La bureaucratie : promesses répétées, résultats inversés

Le dossier de la bureaucratie illustre parfaitement le fossé entre les promesses et la réalité. Duhaime déplore que Legault répète depuis trois élections qu’il veut réduire la fonction publique, mais qu’une fois au pouvoir, au lieu de la diminuer de 5 000 employés comme promis, il l’a augmentée de 10 000. Même chose pour l’accélération des projets économiques et la réduction administrative : après sept ans au pouvoir, la situation est « pire que jamais ».

Le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement a d’ailleurs réagi vivement, affirmant que « la CAQ prend encore la fonction publique pour cible ». Les syndicats accusent le gouvernement de « faire diversion » plutôt que de s’attaquer aux vrais problèmes.

L’islamisme radical : priorité ou diversion?

Autre élément controversé du discours inaugural : Legault a qualifié la situation d’« assaut » islamiste. Duhaime, qui affirme avoir été le premier à dénoncer les prières de rue devant la Basilique Notre-Dame, accueille cette position favorablement mais nuance : « Je ne pense pas que c’est la principale priorité au Québec ».

Il cite le rapport sur l’école Bedford comme exemple préoccupant et estime qu’il faut agir de façon préventive avant que la situation ne dérape comme en Europe. Toutefois, il reconnaît que d’autres enjeux, notamment le coût de la vie, touchent plus directement l’ensemble des Québécois.

Le coût de la vie : la vraie urgence

C’est justement sur le plan économique que Duhaime croit pouvoir faire la différence. Pour lui, l’inflation représente l’enjeu le plus important alors que les Québécois s’appauvrissent rapidement. Le PCQ réclame depuis des mois une réduction des taxes sur l’essence et l’abolition de la taxe carbone.

Le Québec paie beaucoup plus cher l’essence que partout ailleurs au Canada, ce qui affecte l’ensemble de la consommation. Duhaime révèle même que plusieurs députés caquistes appuient en privé l’abolition de la taxe carbone, mais que le gouvernement hésite car « politiquement, ce n’est pas aussi rentable que d’envoyer des chèques ». S’il recule sur cet engagement pour cette raison, ce serait « pitoyable », déplore-t-il.

Un discours trop « vaseux »

Au-delà de la satisfaction générale, Duhaime reproche au premier ministre un manque flagrant de précision. Les principes énoncés restent vagues et « veulent dire tout et rien en même temps ». Sur les syndicats, par exemple, aucune mention du vote secret ou des cotisations facultatives. Sur le coût de la vie, demander au ministre d’« aider le monde » demeure flou.

Le chef conservateur compare cette approche à un « strip-tease » : le gouvernement dévoile juste assez pour tenir les gens « en haleine jusqu’à Noël ». Une stratégie de communication qui alimente les doutes sur les véritables intentions de la CAQ.

L’offre de collaboration

Malgré ses réserves, Duhaime tend la main. Il a envoyé une lettre à Legault pour solliciter une rencontre, rappelant que le premier ministre avait promis de rencontrer tous les chefs de partis comme en janvier 2023. « Il reste un an avant les élections. Je pense que c’est maintenant ou jamais », affirme-t-il. Il attend toujours une réponse.

Plus largement, le chef conservateur invite tous les partis à « continuer de nous voler nos idées ». Il se réjouit même de voir le PQ et le PLQ effectuer un virage pour s’éloigner du modèle bureaucratique québécois « rendu à bout de souffle ». Pour lui, ce mouvement général confirme la pertinence des idées qu’il défend depuis des années.

Pourquoi choisir l’original?

Quand on lui demande ce qui différencie encore le PCQ si les autres adoptent ses idées, Duhaime ramène le débat à l’essentiel : la conviction. Là où la CAQ, le PLQ et le PQ « oscillent en fonction du sondage du jour », le PCQ défend les mêmes valeurs depuis le début.

Les faits parlent d’eux-mêmes. En 2021, Duhaime a pris la tête d’un parti moribond à 1% dans les sondages avec 400 membres et 200$ en banque. Quatre ans plus tard, le PCQ compte 63 000 membres, des millions en financement et 15% d’intentions de vote. Cette progression ne repose pas sur des calculs électoraux de dernière minute, mais sur un travail constant de terrain et de conviction.

Duhaime va aussi « beaucoup plus loin » que ce que propose Legault. Sur la taxe carbone, sur la réforme syndicale en profondeur, sur la réduction réelle de l’État : le PCQ n’offre pas des demi-mesures, mais des solutions structurantes. Et contrairement à la CAQ qui promet depuis sept ans de réduire la bureaucratie tout en l’augmentant, le PCQ n’a pas de contradictions embarrassantes à expliquer.

« Les gens préfèrent toujours l’original à la copie quand vient le temps de voter », affirme-t-il. Une formule qui résume son pari électoral : miser sur la cohérence et l’authenticité plutôt que sur les virages opportunistes.

La rupture avec l’ADQ : un présage

Cette méfiance envers Legault n’est pas nouvelle pour Duhaime. Il faisait partie des 35-40% d’adéquistes qui ont voté contre la fusion avec la CAQ, craignant déjà que Legault ne veuille pas aller assez loin et ne livre pas les résultats promis. Le sort réservé aux anciens adéquistes lui donne raison, notamment le limogeage récent de François Bonnardel, l’un des plus fidèles qui avait permis la fusion, « passé en dessous de l’autobus au dernier remaniement ministériel ».

Le discours de Legault est perçu par plusieurs comme une « tentative ultime de relancer son gouvernement ». Reste à voir si le premier ministre ira au bout de ses promesses cette fois-ci, ou si l’histoire se répétera comme en 2019. Pour Duhaime, la sincérité de ce virage se mesurera dans les détails : « Le diable est dans les détails… Il va falloir mettre de la chair autour de l’os ».

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Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier est journaliste pour PiluleRouge.ca. Passionné de politique depuis plus de dix ans, il s'est impliqué à plusieurs reprises sur la scène provinciale. Entrepreneur en informatique, il allie rigueur journalistique et regard critique sur l’actualité. Son approche analytique et son sens de l’humour apportent une perspective unique aux sujets qu’il couvre.

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