Lundi, octobre 13, 2025

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Le chef du Parti conservateur du Québec dévoile un projet de loi autonomiste calqué sur le modèle de Danielle Smith, dans la foulée de la visite montréalaise de la première ministre albertaine.

Éric Duhaime sort l’artillerie lourde en matière d’autonomie provinciale. Le chef conservateur a présenté mercredi un projet de loi privé directement inspiré de la législation albertaine qui permet à une province de refuser d’appliquer des mesures fédérales jugées inconstitutionnelles ou contraires à ses intérêts. L’initiative survient deux jours après la visite de la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, à Montréal, avec qui Duhaime affirme avoir discuté de son projet.

Un modèle albertain éprouvé

La Loi visant à défendre et à renforcer l’autonomie du Québec au sein de la Confédération canadienne s’inspire directement de l’Alberta Sovereignty Within a United Canada Act adoptée en 2022. L’Alberta a utilisé sa loi à deux reprises avec succès : en novembre 2023 pour forcer le ministre fédéral Steven Guilbeault à reculer sur les Clear Electricity Regulations, puis en novembre 2024 pour contester le plafond fédéral des émissions de GES.

« Le fédéral sait qu’il va aller contre les lois d’une province, il sait qu’il va se retrouver à ne pas faire respecter, puis ça va créer un précédent, une brèche dans les pouvoirs fédéraux », a soutenu Duhaime. La Saskatchewan a emboîté le pas en mars 2023 avec le Saskatchewan First Act, une législation similaire.

Mécanisme parlementaire et élargissement des pouvoirs

Contrairement au modèle albertain qui se concentre principalement sur les ressources naturelles et l’environnement, la version québécoise couvre un éventail plus large de compétences provinciales incluant la santé, l’éducation, la justice et la culture. Le projet prévoit la création d’un comité parlementaire chargé d’examiner les relations fédérales-provinciales et de recommander des actions à l’Assemblée nationale lorsque des mesures fédérales sont jugées problématiques.

Le projet permettrait aussi au Québec de se joindre systématiquement aux contestations juridiques lancées par d’autres provinces contre le gouvernement fédéral. « Quand elles contestent aussi le pouvoir fédéral, je pense qu’il faut s’unir avec les autonomistes des autres provinces », a déclaré le chef du PCQ.

Perche tendue à Jolin-Barrette

Dans un geste surprenant, Duhaime tend une perche au gouvernement Legault en pleine crise de popularité. Il souhaite transmettre son projet au ministre de la Justice Simon Jolin-Barrette, qui dépose mercredi une loi constitutionnelle pour le Québec. « Dans une volonté constructive de faire avancer l’autonomie du Québec, nous demandons au ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, de mettre la partisanerie de côté et de le déposer en chambre, voire même de le bonifier », lance-t-il dans son communiqué.

« C’est un gouvernement qui a la légitimité démocratique de gouverner encore pour les 12 prochains mois. Mais son autorité morale est gravement affectée présentement », a reconnu Duhaime, ajoutant que le gouvernement a « intérêt à avoir des consensus le plus large possible ».

Combat historique et attaque contre le PQ

Le chef conservateur inscrit son initiative dans une longue tradition autonomiste, rappelant que son parti « travaille sur sa politique autonomiste » depuis trois ans et que l’autonomie était le thème central du congrès de novembre 2023 à Lévis. Il trace une lignée historique de premiers ministres provinciaux qui se sont battus contre la centralisation fédérale, d’Oliver Mowat en Ontario au 19e siècle à Maurice Duplessis au Québec avec l’adoption de l’impôt provincial en 1954.

Duhaime n’épargne pas le Parti québécois, qu’il accuse de nuire à l’autonomie du Québec avec son projet référendaire. « Pour moi, la pire chose qui pourrait arriver pour l’autonomie du Québec, pour le pouvoir québécois, c’est qu’on ait encore un troisième référendum perdant », a-t-il lancé, rappelant que les défaites de 1980 et 1995 ont entraîné des reculs pour le Québec.

« Je trouve ça particulièrement bizarre depuis hier de voir le Parti québécois s’objecter à l’adoption d’une constitution québécoise », a-t-il dit, ajoutant que le PQ « a été au pouvoir à cinq reprises » sans jamais adopter de constitution.

Applications concrètes et philosophie conservatrice

Questionné sur des exemples précis d’utilisation, Duhaime évoque les projets de développement énergétique où « le fédéral met des bâtons dans les roues » avec ses évaluations environnementales. « Si on veut continuer à bloquer le processus […] on va faire nos propres évaluations, nous autres même au Québec, on n’a pas besoin du fédéral », a-t-il précisé.

Interrogé sur la pertinence de ces débats constitutionnels alors que les Québécois sont préoccupés par le coût de la vie, Duhaime admet la déconnexion : « Les gens, moi, quand je les rencontre au Tim Hortons, ils ne me parlent pas du tout de constitution. Ils me parlent du fait que ça leur coûte cher l’épicerie ».

Mais il défend la nécessité d’un cadre législatif solide par sa philosophie conservatrice : « Quand on est à droite […] on veut toujours avoir le pouvoir le plus près du citoyen. Philosophiquement, un conservateur, c’est quelqu’un qui en a souvent contre la centralisation excessive », a-t-il expliqué.

Lien avec l’immigration

Le chef du PCQ établit aussi un lien entre l’immigration de masse et l’ingérence fédérale. « Le fait qu’on ait une immigration de masse qui est très contestée et que les Québécois trouvent qu’on en a eu beaucoup trop au cours des dernières années. Bien, c’est sûr que oui, il y a une partie du blâme qui peut revenir au gouvernement du Québec, mais la grande partie du blâme doit revenir au gouvernement fédéral », a-t-il affirmé.

Un timing calculé

L’annonce coïncide avec la visite de Danielle Smith à Montréal le 6 octobre pour prononcer une allocution devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Duhaime confirme avoir rencontré Smith « dimanche dernier » et avoir discuté de son projet avec elle. La synchronisation avec le dépôt de la loi constitutionnelle de Jolin-Barrette n’est pas fortuite : « C’est le sujet de la semaine, on dirait », a-t-il reconnu.

Le chef conservateur appelle à dépasser la partisanerie : « Je ne vois pas un parti qui s’objecterait à combattre l’ingérence fédérale dans les compétences du Québec », a-t-il déclaré. Il promet d’autres initiatives autonomistes dans les prochains mois, affirmant que « le Parti conservateur du Québec, c’est un parti qui est pleinement autonomiste ».

Reste à voir si son appel transpartisan trouvera écho à l’Assemblée nationale.

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Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier est journaliste pour PiluleRouge.ca. Passionné de politique depuis plus de dix ans, il s'est impliqué à plusieurs reprises sur la scène provinciale. Entrepreneur en informatique, il allie rigueur journalistique et regard critique sur l’actualité. Son approche analytique et son sens de l’humour apportent une perspective unique aux sujets qu’il couvre.

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