Trump frappe fort avec sa promesse de tarifs : une stratégie de négociation avant tout géopolitique

IAN SÉNÉCHAL | Le président élu Donald Trump a déclenché une onde de choc en annonçant son intention d’imposer un tarif de 25 % sur tous les produits importés des deux plus grands partenaires commerciaux des États-Unis, le Canada et le Mexique. Dans un message incendiaire publié sur ses réseaux sociaux, Trump a justifié cette décision comme une réponse à l’immigration illégale et au trafic de fentanyl, qu’il associe à ces deux pays. Cette annonce, qui doit prendre effet dès son entrée en fonction le 20 janvier prochain, a provoqué une réaction immédiate des marchés et des leaders politiques des trois nations.

Une monnaie sous pression

Sur les marchés financiers, l’effet a été brutal. Le peso mexicain a chuté de 1,57 %, tandis que le dollar canadien a reculé de 1,06 %. Ces baisses témoignent de l’inquiétude des investisseurs face à la possibilité d’un bouleversement des relations commerciales en Amérique du Nord. La volatilité des devises reflète également les craintes de répercussions économiques potentielles pour les exportateurs, particulièrement au Canada, où les États-Unis absorbent près de 75 % des exportations nationales.

Une réponse unifiée des premiers ministres canadiens

Face à cette menace, les premiers ministres provinciaux du Canada ont réagi rapidement. François Legault a exprimé son inquiétude pour l’économie québécoise et canadienne, offrant la collaboration du Québec au gouvernement fédéral pour désamorcer cette crise. Doug Ford, premier ministre de l’Ontario, a qualifié les tarifs de « dévastateurs » pour les travailleurs et a appelé à une réunion urgente avec Justin Trudeau et tous les premiers ministres provinciaux. De son côté, Danielle Smith, de l’Alberta, a souligné l’importance pour Ottawa de « protéger la relation commerciale essentielle » avec les États-Unis, appelant à une réponse ferme et coordonnée.

En bout de piste, c’est Danielle Smith qui a l’approche la plus pragmatique des trois. Danielle Smith reconnaît les préoccupations de Trump sur les activités illégales à la frontière et presse Ottawa d’agir pour éviter des tarifs. Elle souligne que l’énergie de l’Alberta, exportée via des pipelines sécurisés, n’est pas liée à ces activités, et se dit prête à coopérer avec l’administration Trump pour renforcer la sécurité énergétique bilatérale.

Une analyse pragmatique de Bill Ackman

L’investisseur américain Bill Ackman, connu pour ses commentaires francs sur les enjeux économiques et financiers, a apporté une perspective différente. Selon lui, l’annonce de Trump est avant tout une manœuvre géopolitique, visant à obtenir des concessions politiques et économiques de la part du Canada et du Mexique.

Ackman a expliqué : « Les tarifs de 25 % ne seront pas appliqués, ou seront retirés, si le Canada et le Mexique arrêtent le flux d’immigrants illégaux et de fentanyl vers les États-Unis. » Il interprète cette stratégie comme un levier pour atteindre des objectifs qui s’inscrivent dans la politique « America First » de Trump, avant même son entrée en fonction. « C’est une façon brillante pour Trump d’influencer la politique étrangère avant même de prendre ses fonctions », a-t-il ajouté.

Un geste plus politique qu’économique

Pour l’instant, les impacts économiques restent hypothétiques. L’imposition effective des tarifs dépendra de la capacité du Canada et du Mexique à répondre aux exigences de Trump sur des enjeux aussi complexes que l’immigration et la lutte contre le trafic de drogue. Cependant, l’annonce envoie un signal clair : Trump est prêt à utiliser les outils économiques pour faire avancer ses priorités géopolitiques.

En somme, la promesse tarifaire de Trump constitue une ouverture agressive dans ce qui pourrait devenir une longue négociation trilatérale. Si les marchés et les gouvernements réagissent déjà avec nervosité, l’objectif immédiat semble être politique, visant à établir un rapport de force avant même l’entrée en fonction du président élu. Une chose est certaine : cette stratégie marque le retour d’une diplomatie commerciale musclée, avec des implications profondes pour l’Amérique du Nord.

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