La Chine mène une stratégie sophistiquée et multiforme pour contrôler et façonner son image à l’étranger. Consciente du rôle croissant de la perception internationale dans l’affirmation de sa puissance, elle mobilise un arsenal diplomatique, médiatique et technologique pour influencer les opinions publiques étrangères, neutraliser les critiques et projeter une image de puissance responsable, moderne et bienveillante.
La diplomatie publique est un outil clé de cette stratégie, grâce à l’expansion rapide de ses médias étatiques tels que CGTN et Xinhua, qui diffusent dans diverses langues pour offrir une alternative au discours dominant. Ils mettent en avant une image positive de la Chine, tout en remettant en question la légitimité des critiques, notamment sur les droits de l’homme, Hong Kong et le Xinjiang.
La Chine utilise également des outils plus subtils tels que les instituts Confucius, installés dans des centaines d’universités à travers le monde. Officiellement axés sur la diffusion de la langue et de la culture chinoises, ces établissements agissent également comme des vecteurs d’influence idéologique, tentant parfois d’empêcher les discussions sur les sujets politiques internes sensibles.
Depuis 2020, la stratégie chinoise s’est durcie avec l’émergence de la diplomatie dite du « loup combattant ». Contrairement à la retenue diplomatique traditionnelle, cette posture se caractérise par des déclarations publiques agressives, des critiques virulentes des journalistes occidentaux et un recours systématique aux réseaux sociaux pour répondre immédiatement et fermement aux accusations. Ce ton combatif vise à galvaniser la fierté nationale tout en dissuadant les critiques internationales.
Pour faire face aux accusations internationales, notamment au sujet du Xinjiang ou de la gestion de la crise de la COVID-19, Pékin a recours à deux stratégies. La première consiste à publier des rapports officiels ou des contre-narratifs dans le but de réfuter les allégations. La seconde vise à sensibiliser la population grâce à une couverture médiatique proactive par l’entremise de ses propres organes de presse. En outre, la Chine adopte une forme de « silence stratégique » dans certaines situations, préférant ne pas répondre directement à des allégations mineures afin de ne pas leur accorder de crédibilité. Elle peut aussi recourir à des campagnes d’humour ou à des contenus viraux sur les réseaux sociaux pour tourner en dérision ou minimiser les critiques, ce qui lui permet de maîtriser la narration et de limiter les conséquences des crises sur sa réputation internationale.
La Chine est également experte en anticipation et encadrement des récits. Elle investit dans des campagnes de relations publiques, telles que des documentaires sur ses avancées technologiques, pour promouvoir une image positive avant les controverses. En même temps, Pékin surveille les réseaux sociaux et utilise des armées de trolls ou des comptes automatisés pour amplifier ses messages et noyer les critiques. Cela montre une approche proactive visant à neutraliser les risques réputationnels dès leur apparition.
La République populaire ne se contente pas de réagir : elle anticipe et encadre les narratifs. Elle investit massivement dans des campagnes de relations publiques, achète des espaces médiatiques dans des journaux étrangers, et développe des partenariats médiatiques afin de diffuser des contenus favorables. Par ailleurs, elle surveille et tente d’influencer les communautés diasporiques chinoises, les encourageant à devenir des relais de la politique du Parti communiste chinois à l’étranger.
Enfin, la Chine a recours à la coercition indirecte : elle menace de représailles économiques les entreprises, universités ou gouvernements qui critiquent sa politique, comme cela a été observé en Australie ou en Lituanie. Ces mesures ont pour but d’imposer un « coût » aux discours critiques et de décourager toute prise de position hostile à Pékin.
En résumé, la Chine utilise diverses méthodes, telles que la diplomatie, la propagande, la cyberdiplomatie et la coercition économique, pour gérer son image internationale. Elle cherche à imposer sa vision du monde en contrôlant le discours mondial.
Forsby, A.B. (2025) “Emotional assertiveness: China’s coercive diplomacy against non-state actors,” International Affairs, 101(2), pp. 583–602. Available at: https://doi.org/10.1093/ia/iiae325.
Yang, L. and Yang, H. (2025) ‘Aggressive Journalistic Questioning and China’s “Wolf Warrior Diplomacy”’, The China Quarterly, pp. 1–18. doi:10.1017/S0305741025000396.