Depuis quelques jours, je vois passer un certain nombre de commentaires de souverainistes sur ce qu’ils appellent « la droite de Québec ». Et visiblement, il y a un malentendu qui refuse de mourir.
Dans l’esprit de plusieurs, un vote pour le Parti québécois équivaut à un vote uniquement pour l’indépendance. Point final. Comme si, une fois les bulletins dépouillés, tout ce qui comptait, c’était de voir la cause nationale avancer vers un référendum. Même la partielle d’Arthabaska, où la souveraineté n’a jamais été un enjeu ni même un thème de campagne, est à leurs yeux une sorte de répétition en vue du grand concert référendaire de 2027.
Le problème, c’est qu’en 2026, le PQ ne se présentera pas à une élection référendaire. Il se présentera à une élection générale, avec l’objectif de gouverner le Québec et d’exercer le pouvoir. Et gouverner, ça veut dire appliquer un programme. Pas seulement préparer une question référendaire. Si le PQ est élu en 2026, c’est la seule chose dont on peut être certain : il gouvernera. On ne sait pas s’il y aura un référendum, encore moins s’il sera gagnant ou perdant, mais on sait que le PQ exercera le pouvoir.
Un programme qui compte… même sans référendum
Que l’on soit pour ou contre, il faut être lucide : référendum ou pas, une fois élu, le Parti québécois mettra en œuvre son programme, en tout ou en partie. Et si ce programme ressemble à celui de 2022, le résultat risque d’être catastrophique pour quiconque se réclame de la droite économique ou du conservatisme fiscal.
On n’a qu’à se souvenir du programme de 2018, où l’expression « ÉTAT FORT » apparaissait plus de vingt fois. Ce n’est pas un hasard : la tradition péquiste, c’est un État interventionniste, centralisateur et généreux en réglementations.
Pourquoi la droite n’embarque pas
Les électeurs de droite, qu’ils soient nationalistes ou pas, ne veulent pas d’un État nounou, d’un interventionnisme lourd, d’une fiscalité punitive au nom de l’environnement et de l’expansion sans fin de la social-démocratie. Or, c’est exactement ce que le PQ a offert dans ses dernières plateformes. Au yeux de la droite, le PQ est un parti du Statu Quo.
Dans ce contexte, l’argument « l’indépendance n’est ni à gauche ni à droite » me semble bancal. Parce que, concrètement, atteindre l’indépendance par la voie du PQ implique nécessairement de mettre en place un programme de gauche social-démocrate pour y arriver, au moins provisoirement, le temps d’un référendum.
Se boucher le nez… pour combien de temps?
Certains nationalistes de droite ou souverainistes conservateurs acceptent de « se boucher le nez » : ils sont prêts à tolérer un an, quatre ans (ou plus) d’expansion de la social-démocratie, en mettant de côté les réformes profondes dont le Québec a besoin (en santé, en économie, en énergie, en finances publiques, en fiscalité, etc.), dans l’espoir qu’un référendum ait lieu… et soit gagné.
C’est leur choix. Mais qu’on ne s’étonne pas si d’autres, à droite, refusent ce diner de cons.
Un choix clair
Le point central est simple : voter PQ, ce n’est pas seulement voter pour un projet d’indépendance. C’est aussi, et surtout, confier le pouvoir à un parti qui applique une vision économique, sociale et environnementale très éloignée des priorités de la droite.
Si j’étais en France, je serais peut-être favorable à la sortie de l’Union européenne. Mais si le prix à payer pour en sortir était de me coltiner cinq ans de Jean-Luc Mélenchon ou de François Hollande 2.0, je dirais non. D’ailleurs, c’est notamment sur cette question que l’union des droites n’a jamais été réellement possible.
D’autre part, les souverainistes devraient comprendre que la droite dite « de Québec » a été charmée puis cocufiée à maintes reprises. D’abord au municipal par un certain Régis Labeaume, ensuite par Québec 21, et finalement, au provincial, par la CAQ. Ce parti que l’on nous présentait comme de centre-droit, censé transformer le Québec, s’est finalement révélé être un PQ sans sa seule bonne idée, agrémenté d’anciens corporatistes libéraux et de deux ou trois figures de droite, comme Youri Chassin, pour séduire Québec.
Alors, oui, l’indépendance n’appartient ni à la gauche ni à la droite… mais le chemin que l’on prend pour y arriver, lui, est profondément teinté d’idéologie. Et c’est précisément ce que beaucoup refusent de voir.
Ou peut-être le voient-ils et s’en foutent, mais ce n’est pas le cas de tout le monde.