Le premier ministre François Legault a procédé mercredi au remaniement ministériel qui pourrait bien être sa dernière carte avant les élections de 2026. Dans une cérémonie tenue à l’Assemblée nationale, 30 personnes ont prêté serment devant la lieutenante-gouverneure Manon Jeannotte, marquant un tournant politique majeur pour la Coalition avenir Québec. Le cabinet est composé de 29 ministres.
Un noyau dur intact malgré les attentes
Contrairement au « grand remaniement » promis depuis juin, François Legault a fait le pari de la stabilité en conservant ses ministres économiques. Éric Girard demeure aux Finances, Christine Fréchette au ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Christian Dubé à la Santé et Jean Boulet au Travail. Cette décision surprend alors que plusieurs députés caquistes espéraient « plus que des modifications cosmétiques ».
Le premier ministre a justifié ce choix par le contexte de guerre tarifaire avec les États-Unis de Donald Trump, privilégiant la continuité dans les ministères à vocation économique.
Les nouvelles recrues au cabinet
Quatre nouveaux ministres font leur entrée au conseil des ministres :
Donald Martel devient ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation.
Amélie Dionne hérite du Tourisme et des responsabilités régionales du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine.
Éric Girard (homonyme du ministre des Finances) devient ministre délégué au développement économique régional et responsable du Saguenay-Lac-Saint-Jean, comblant le vide laissé par la démission d’Andrée Laforest.
Samuel Poulin obtient les responsabilités de la Jeunesse et de l’économie déléguée aux PME. Sa nomination vise du moins en partie à contrer la montée du Parti conservateur d’Éric Duhaime en Beauce.
Changements notables dans les responsabilités
Sonia LeBel fait le saut du Conseil du trésor vers l’Éducation, succédant à Bernard Drainville.
France-Élaine Duranceau obtient une promotion controversée en devenant présidente du Conseil du trésor, malgré ses déboires à l’Habitation. François Legault l’a surnommée « Cruella » avec humour, une référence peu flatteuse pour celle qui devra « couper profondément » dans la bureaucratie.
Jonatan Julien passe des Infrastructures aux Transports, héritant du dossier explosif de SAAQclic et du troisième lien. Lors de la cérémonie, François Legault lui a d’ailleurs chuchoté qu’une « grosse job » l’attendait.
Le nouveau ministre de l’Environnement Bernard Drainville, qui avait déjà déclaré « lâchez-moi avec les GES » au sujet du troisième lien, aura notamment pour mandat de « réduire les délais et la réglementation qui retardent les projets économiques ».
Christopher Skeete élargit son portefeuille en devenant ministre des Relations internationales et de la Francophonie, en plus de conserver la lutte contre le racisme et la région de Laval.
Kateri Champagne Jourdain passe de l’Emploi à la Famille, conservant la Côte-Nord. Elle devient ainsi la première femme autochtone à occuper ce ministère. Pour elle, ce changement fait sens : avant la politique, elle s’intéressait aux pénuries de main-d’œuvre qui touchent particulièrement les CPE.
Ian Lafrenière conserve les Relations avec les Premières Nations tout en ajoutant la Sécurité publique, avec pour mandat d’incarner « la loi et l’ordre » et de s’attaquer aux gangs de rue.
Les perdants du remaniement
François Bonnardel, écarté du conseil des ministres après le fiasco SAAQclic, brillait par son absence lors de la cérémonie. Maïtée Blanchette Vézina retourne également sur les banquettes arrière après sa réforme controversée du régime forestier.
Composition complète du nouveau conseil des ministres
Premier ministre : François Legault (responsable de l’Abitibi-Témiscamingue)
Finances : Éric Girard
Économie, Innovation et Énergie : Christine Fréchette
Éducation : Sonia LeBel
Santé : Christian Dubé
Justice et Relations canadiennes : Simon Jolin-Barrette
Affaires municipales : Geneviève Guilbault
Environnement, Faune et Parcs : Bernard Drainville (responsable Chaudière-Appalaches)
Administration gouvernementale et Conseil du trésor : France-Élaine Duranceau
Immigration, Francisation et Langue française : Jean-François Roberge
Sécurité publique : Ian Lafrenière (responsable Nord du Québec)
Travail : Jean Boulet (responsable Mauricie)
Culture et Communications : Mathieu Lacombe (responsable Outaouais)
Enseignement supérieur : Martine Biron
Transports et Mobilité durable : Jonatan Julien
Habitation : Sonia Bélanger (responsable Laurentides)
Services sociaux et Montérégie : Lionel Carman
Infrastructures : Benoît Charette
Agriculture, Pêcheries et Alimentation : Donald Martel (responsable Centre-du-Québec)
Aînés et Condition féminine : Caroline Proulx
Métropole et région de Montréal + Solidarité sociale : Chantal Rouleau
Relations internationales et Francophonie : Christopher Skeete (responsable relations anglophones, lutte contre le racisme et région de Laval)
Sport et Estrie : Isabelle Charest
Emploi : Pascale Déry (responsable Lanaudière)
Ressources naturelles et Forêts : Jean-François Simard (responsable Capitale-Nationale)
Famille : Kateri Champagne Jourdain (responsable Côte-Nord)
Cybersécurité et Numérique : Gilles Bélanger
Tourisme : Amélie Dionne (responsable Bas-Saint-Laurent et Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine)
Développement économique régional : Éric Girard (responsable Saguenay-Lac-Saint-Jean)
Jeunesse et PME : Samuel Poulin
Autres membres du Conseil exécutif :
Un moment historique pour la Côte-Nord
Un fait sans précédent marque ce remaniement : pour la première fois, les deux députés de la Côte-Nord siègent simultanément au Conseil exécutif. « Je ne sais pas si on va revoir cela dans le futur, mais la Côte-Nord au complet est assise au conseil des ministres », s’est réjouie Kateri Champagne Jourdain. Yves Montigny devient président du caucus, remplaçant François Jacques qui devient whip en chef.
Ce remaniement reflète la stratégie de fin de mandat de François Legault, qui mise sur la continuité économique tout en préparant ses pièces maîtresses pour les élections de 2026. Reste à voir si cette approche permettra à la CAQ de reconquérir l’électorat québécois ou non.