Postes Canada ne remboursera probablement jamais le milliard de dollars que lui a récemment prêté Ottawa. C’est une prédiction pessimiste, certes — mais tout aussi réaliste.
Le gouvernement fédéral a accordé un « prêt remboursable » le 24 janvier dernier à Postes Canada pour « prévenir son insolvabilité ».
En théorie, cette somme devrait être remboursée aux contribuables, mais uniquement « dans la mesure où les revenus de l’entreprise le permettent ».
En d’autres mots, on ne reverra jamais cet argent. Car faut-il le rappeler: Postes Canada perd de l’argent année après année.
En 2024 seulement, la société d’État a enregistré une perte de 841 millions de dollars.
C’est la septième année consécutive dans le rouge, avec des pertes cumulées de 3,8 milliards depuis 2018.
La situation est tellement désastreuse que la Commission d’enquête industrielle mandatée par Ottawa n’a pas mâché ses mots : Postes Canada fait face à une crise existentielle. Son insolvabilité serait inévitable.
Et les pires années pourraient encore être à venir. Dans son rapport annuel 2023, la direction de Postes Canada elle-même reconnaît que les pertes futures risquent d’être encore plus lourdes, insoutenables même, si rien ne change.
Le financement accordé ne règle rien aux problèmes de fond, bien au contraire.
Comme c’est souvent le cas avec les renflouements publics, un versement en appelle un autre.
Postes Canada l’a déjà admis : elle pourrait devoir contracter d’autres emprunts à court terme pour finir l’année 2025, et elle aura besoin de financements annuels récurrents pour maintenir ses opérations et respecter ses obligations envers ses employés.
Bref, les contribuables ne paieront pas une seule fois. Ils paieront à perpétuité.
Il est grand temps que les élus à Ottawa se ressaisissent. Ce n’est pas aux contribuables de supporter éternellement une société d’État déficitaire.
Si Postes Canada souhaite continuer à exister, elle doit se comporter comme une véritable entreprise et apprendre à marcher par elle-même.
Et si elle ne rembourse pas chaque sou du milliard emprunté, les élus ont le devoir de demander des comptes.
Qui assume la responsabilité de cet échec? Qui est congédié?
Mais surtout, il faut poser la seule vraie question qui vaille : pourquoi ne pas vendre Postes Canada?
À quoi bon demeurer propriétaire, et maintenant créancier, d’une entreprise qui peine à livrer la marchandise, dans tous les sens du terme?
Plusieurs pays ont déjà emprunté cette voie.
Le Royaume-Uni a privatisé Royal Mail, et l’ancien chancelier de l’Échiquier George Osborne a bien résumé les choses : en vendant l’entreprise, le gouvernement aide cette institution à prospérer et à investir dans l’avenir, tout en utilisant les recettes pour rembourser la dette nationale.
Le Canada, lui, s’accroche à un modèle dépassé, inefficace et coûteux.
L’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche, le Portugal, Israël, le Japon, la Belgique et Malte ont tous partiellement ou totalement privatisé leurs services postaux.
En Europe, le marché de la livraison du courrier est ouvert à la concurrence depuis 2013. Les monopoles d’État sont une relique du passé.
Résultat : dans les pays qui ont privatisé leur service postal, les prix des timbres ont baissé de 11 % à 17 % en dix ans, selon l’économiste Vincent Geloso.
Pendant ce temps, alors que Postes Canada est devenue une société d’État en 1981, les prix n’ont fait qu’augmenter, et plus rapidement que l’inflation.
Le prix du timbre est passé de 17 cents à 30 cents presque immédiatement après la création de la société, et aujourd’hui, il faut débourser 1,44 $.
Pour un service de plus en plus lent, et de moins en moins fiable.
Finalement, il devient de plus en plus évident que Postes Canada ne vaut pas le prix que les contribuables ont à payer pour la maintenir en vie. Elle coûte trop cher. Elle offre peu en retour. Elle cumule les déficits. Et les grèves ne font que perdurer.
Assez, c’est assez.
Le gouvernement doit cesser d’utiliser l’argent des Canadiens pour colmater un navire condamné aux abysses. Il est temps de vendre Postes Canada et de libérer les contribuables de ce fardeau.