Le Hamas étudie actuellement une nouvelle proposition de cessez-le-feu de 60 jours avec Israël, soutenue par l’administration Trump, mais le groupe militant palestinien maintient sa position de longue date exigeant un arrêt permanent des hostilités. Cette hésitation intervient alors que les négociations semblent avoir pris un nouvel élan après des mois de blocage.
Une proposition américaine sous pression
Le président Donald Trump a annoncé mardi : « Israël a accepté les conditions nécessaires pour finaliser le cessez-le-feu de 60 jours, pendant lequel nous travaillerons avec toutes les parties pour mettre fin à la guerre. » Cette déclaration marque un tournant diplomatique, indiquant qu’Israël serait prêt à enclencher une trêve temporaire en vue d’un règlement durable du conflit.
L’envoyé spécial américain Steve Witkoff mène ces négociations avec le soutien des médiateurs traditionnels que sont l’Égypte et le Qatar. La proposition prévoit la libération de 28 otages israéliens — 10 vivants et 18 décédés — en échange de centaines de prisonniers palestiniens.
Taher al-Nunu, un responsable du Hamas, a déclaré que le groupe était « prêts et sérieux à conclure un accord » mais seulement pour « toute initiative qui mène clairement à la fin complète de la guerre ». Cette position illustre le fossé persistant entre les deux camps.
Les règles du jeu proposées
La proposition actuelle s’articule autour de plusieurs éléments clés. Les 28 otages seraient libérés en cinq groupes sur la période de 60 jours, avec huit otages vivants libérés le premier jour et deux autres le dernier jour. Entre ces dates, les corps des otages décédés seraient remis en trois groupes séparés.
Le Hamas a également accepté de ne pas organiser de cérémonies publiques de propagande lors des remises d’otages, contrairement à ce qui s’était passé lors de la trêve de janvier-février précédente. Cette concession répond aux critiques internationales qui avaient dénoncé ces mises en scène.
En contrepartie, Israël devrait procéder à un retrait partiel de Gaza et permettre une augmentation massive de l’aide humanitaire dans le territoire. Les médiateurs américains, égyptiens et qataris fourniraient des assurances sur la poursuite des négociations pour mettre fin définitivement au conflit, mais Israël ne s’engage pas formellement à cette fin dans cette proposition.
Un précédent qui a mal tourné
L’histoire récente ne plaide pas en faveur de l’optimisme. Un cessez-le-feu avait été mis en place du 19 janvier au 18 mars 2025, permettant la libération de 33 otages israéliens en échange d’environ 1 900 prisonniers palestiniens. Mais le 18 mars, Israël a lancé des frappes aériennes surprises sur Gaza, rompant le cessez-le-feu avec le Hamas, Netanyahu justifiant cette action par le refus du Hamas de libérer des otages et son rejet des propositions d’extension du cessez-le-feu.
Voir aussi : Israël frappe Gaza : Le cessez-le-feu vole en éclats dans un déluge de feu
Cette rupture brutale du précédent accord jette une ombre sur les négociations actuelles. Le mécanisme de vérification basé au Caire, incluant des représentants d’Israël, du Hamas et des médiateurs, avait pourtant fonctionné lors de crises ponctuelles, mais n’avait pas pu empêcher l’effondrement final.
Les soutiens internationaux se mobilisent
Les États-Unis mènent la charge diplomatique, avec Trump intensifiant la pression sur les deux camps. L’administration américaine a obtenu le soutien des médiateurs traditionnels — l’Égypte et le Qatar — qui « ont travaillé dur pour apporter la paix et vont présenter une proposition », selon les mots de Trump.
Les pays européens se sont également mobilisés. En mars, les ministères des Affaires étrangères de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni ont exprimé leur soutien à un cessez-le-feu immédiat, appelant toutes les parties à reprendre les négociations et à travailler à une solution durable. Ce soutien s’inscrit dans l’effort international coordonné avec les États-Unis, le Qatar et l’Égypte.
Le Canada, le Royaume-Uni et la France ont publié une déclaration conjointe soutenant « les efforts menés par les États-Unis, le Qatar et l’Égypte pour obtenir un cessez-le-feu immédiat à Gaza », soulignant que ces négociations représentent « le meilleur espoir de mettre fin à l’agonie des otages et de leurs familles ».
Les divisions au sein du camp palestinien
Si le Hamas reste l’acteur principal, d’autres factions palestiniennes influencent les négociations. Le Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP), allié du Hamas, a publiquement encouragé le groupe à « intensifier les efforts, en collaboration avec les médiateurs arabes, pour parvenir à un accord mettant fin à l’agression — même si ce n’est que pour 60 jours ».
Motasem Hamada, membre du bureau du FDLP, a expliqué à Newsweek que leur déclaration visait à proposer « une “étape partielle” qui garantirait un cessez-le-feu, faciliterait l’ouverture des points de passage et répondrait aux besoins humanitaires de la population palestinienne de Gaza ». Cette position pragmatique contraste avec l’intransigeance affichée du Hamas sur la question de l’arrêt définitif du conflit.
Le Jihad islamique palestinien, autre faction importante, a déclaré « avoir participé aux négociations finales » lors des précédentes discussions, montrant l’importance de maintenir l’unité entre les groupes militants.
Netanyahu face à ses propres contradictions
Du côté israélien, Benjamin Netanyahu navigue entre les pressions américaines et ses propres déclarations. Mercredi, il a déclaré sans ambiguïté : « Je vous l’annonce — il n’y aura plus de Hamas », réaffirmant sa position de ne pas accepter la fin du conflit tant que le Hamas n’aura pas été défait.
Cette posture crée un paradoxe : comment négocier un cessez-le-feu avec un groupe qu’on promet d’éliminer? Netanyahu a précédemment affirmé que « L’idée que nous allons arrêter la guerre avant d’avoir atteint tous nos objectifs est hors de question », tout en acceptant apparemment la proposition américaine actuelle.
Les familles d’otages israéliens exercent une pression considérable sur le gouvernement. Idit Ohel, mère de l’otage Alon Ohel, a exprimé son espoir de voir les négociations aboutir, appelant la communauté internationale à intensifier la pression pour favoriser un accord et permettre le retour des otages.
L’urgence humanitaire comme catalyseur
La situation humanitaire catastrophique à Gaza pourrait finalement forcer la main des négociateurs. Les ministres européens ont exprimé leur « profonde inquiétude face à l’annonce du gouvernement israélien du 2 mars de bloquer toute entrée de biens et de fournitures à Gaza », avertissant qu’un tel blocage « risquerait de violer le droit humanitaire international ».
Le médiateur palestino-américain Bishara Bahbah, désigné par l’administration Trump, s’est montré optimiste en déclarant qu’un accord de cessez-le-feu et de libération des otages était « possible dans les jours à venir ». Il a mené des rencontres avec des représentants du Hamas, notamment Ghazi Hamad, et travaille en coordination avec les médiateurs égyptiens et qataris. Il a souligné que les médiateurs qataris et égyptiens étaient « désormais déterminés à conclure un accord qui mette fin au dernier conflit » après la résolution du conflit entre Israël et l’Iran.
L’équation complexe des otages
Environ 50 otages restent détenus à Gaza, dont beaucoup sont présumés morts. Cette réalité tragique pèse lourdement sur les négociations. La proposition actuelle ne couvrirait que 28 de ces otages, laissant les autres pour des phases ultérieures hypothétiques.
L’expérience du précédent cessez-le-feu montre la complexité de ces échanges. Le 21 février, le Hamas a remis à Israël le corps sans vie de Shiri Bibas, après avoir livré le mauvais corps à Israël la veille, illustrant les défis logistiques et émotionnels de ces opérations.
Un pari sur l’avenir
Alors que Hamas confirme « qu’il examine la proposition de cessez-le-feu reçue des médiateurs », l’issue reste incertaine. Le groupe militant « affirme qu’il tient des discussions avec toutes les factions palestiniennes dans la bande de Gaza à propos d’une proposition de cessez-le-feu soutenue par les États-Unis », suggérant qu’une réponse coordonnée pourrait émerger.
La fenêtre diplomatique semble s’ouvrir, mais les positions fondamentales n’ont pas changé. Israël veut détruire le Hamas, alors que le Hamas veut survivre et mettre fin au conflit. Entre ces deux absolus, les médiateurs tentent de construire un pont de 60 jours qui pourrait, peut-être, mener à quelque chose de plus durable.
L’histoire jugera si cette nouvelle tentative diplomatique sauvera des vies ou ne sera qu’une pause avant une reprise des hostilités. Pour l’instant, chaque jour compte pour les familles d’otages et les civils pris dans cette tragédie qui dure depuis trop longtemps.