Dimanche, juillet 20, 2025

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L’IA fait le ménage : les géants de la tech sacrifient des dizaines de milliers emplois

La Silicon Valley vit actuellement l’une de ses plus importantes vagues de licenciements depuis des années, orchestrée par une course effrénée vers l’intelligence artificielle. Microsoft, Intel, Amazon et Google redessinent leurs effectifs à coups de milliers d’emplois supprimés, transformant 2025 en année charnière pour l’industrie technologique.

Microsoft mise tout sur l’IA et élimine 15 000 postes

Avec plus de 15 000 suppressions d’emplois depuis le début de 2025, Microsoft frappe fort et envoie un message clair : l’adaptation à l’IA n’est plus optionnelle. La dernière vague, touchant environ 9 000 postes, a particulièrement affecté les équipes Xbox et les ventes mondiales.

La stratégie est brutale mais cohérente. Julia Liuson, présidente de la division développement chez Microsoft, a annoncé que la maîtrise des outils d’IA, notamment Microsoft Copilot, influencerait désormais directement les évaluations de performance des employés. Une sorte d’ultimatum technologique : « embrace artificial intelligence (AI) or risk being left behind ».

L’investissement colossal de 80 milliards de dollars dans l’infrastructure IA cette année justifie, selon l’entreprise, ces coupes drastiques. Microsoft économise ainsi 500 millions de dollars grâce à l’automatisation, mais au prix d’une restructuration majeure qui touche même les experts techniques et les gestionnaires de produits.

Certains employés ont appris leur licenciement pendant leurs vacances. L’ambiance interne se dégrade, selon plusieurs témoignages d’employés qui évoquent une « culture of fear » installée par ces licenciements constants.

Intel taille dans le vif : 5 500 postes supprimés

Le fabricant de puces traverse une crise existentielle qui se traduit par plus de 5 500 licenciements aux États-Unis. L’Oregon, bastion historique d’Intel, voit partir 2 932 emplois – quatre fois plus que prévu initialement. La Californie perd 1 935 postes, tandis que l’Arizona et le Texas sont également touchés.

Sous la direction du nouveau PDG Lip-Bu Tan, Intel vise une réduction de 20% de ses effectifs pour retrouver sa compétitivité. Un aveu d’échec cuisant : Tan a reconnu qu’Intel ne figure même plus dans le top 10 des entreprises de semi-conducteurs, une chute vertigineuse pour l’ancien géant.

Ces suppressions s’ajoutent aux 15 000 emplois déjà éliminés en 2024, portant le total à plus de 20 000 postes supprimés en moins de deux ans. La capitalisation boursière d’Intel, tombée à 103 milliards de dollars, représente moins de la moitié de sa valeur d’il y a 18 mois.

La concurrence d’AMD et surtout de Nvidia dans les puces d’IA a relégué Intel au second plan. Tan craint même qu’il ne soit « too late for Intel to effectively compete against Nvidia », qui vient d’atteindre une valorisation de 4 000 milliards de dollars.

Amazon resserre la vis chez AWS

Amazon Web Services, pourtant leader du cloud computing, n’échappe pas à la cure d’amaigrissement avec des centaines de suppressions de postes. Ces coupes touchent principalement les équipes de technologie pour les magasins physiques et les divisions ventes et marketing d’AWS.

La décision survient après trois trimestres consécutifs de revenus décevants pour AWS, avec une croissance de seulement 17% au premier trimestre 2025, en décélération par rapport aux 18,9% du trimestre précédent.

Andy Jassy, PDG d’Amazon, avait prévenu le mois dernier que l’IA générative transformerait fondamentalement le travail dans l’entreprise, entraînant « fewer people doing some of the jobs that are being done today, and more people doing other types of jobs ». Une prophétie qui se réalise plus vite que prévu.

Depuis 2022, Amazon a éliminé plus de 27 000 emplois, incluant les récentes coupes chez Prime Video, MGM Studios et Twitch. L’ironie veut que l’entreprise continue de recruter massivement dans d’autres secteurs, avec des milliers d’offres d’emploi AWS en ligne.

Google joue la carte du départ volontaire

Plus subtil dans son approche, Google propose des programmes de départ volontaire à ses employés américains, notamment dans les équipes cruciales de recherche et de publicité. Le programme, baptisé « voluntary exit program », offre 14 semaines de salaire de base plus une semaine supplémentaire par année de service.

Jen Fitzpatrick, vice-présidente senior des systèmes centraux, a expliqué dans un mémo interne : « The Voluntary Exit Program may be a fit for Core Googlers who aren’t feeling excited about and aligned with Core’s mission and goals ». Une façon diplomatique de dire que ceux qui ne s’adaptent pas à la vision IA peuvent partir avec les honneurs.

Si environ 5 000 employés – soit 3% des effectifs d’Alphabet – acceptent l’offre, Google pourrait économiser 1,5 milliard de dollars annuellement après un coût unique de 550 millions en indemnités. Un calcul froid mais efficace.

Cette stratégie fait suite aux 12 000 licenciements de début 2023, soit 6% de la main-d’œuvre. Google pousse également ses employés vers un modèle de travail hybride, abandonnant progressivement le télétravail intégral.

L’industrie tech à l’heure des comptes

Ces restructurations massives s’inscrivent dans une tendance plus large : plus de 100 000 emplois ont été supprimés dans le secteur technologique en 2025. IBM, Meta, Apple et d’autres géants ont également procédé à des coupes, redéfinissant l’écosystème technologique mondial.

La course à l’IA explique en grande partie ces bouleversements. Les entreprises investissent massivement dans l’automatisation tout en réduisant leurs coûts opérationnels. Microsoft à lui seul consacre 80 milliards de dollars à l’infrastructure IA cette année, soit plus que le PIB de nombreux pays.

Les employés restants font face à une nouvelle réalité : l’adoption de l’IA devient une compétence de survie professionnelle. Chez Microsoft, « AI competency, including effective use of Microsoft Copilot, will directly affect employee evaluations ». Une transformation qui redéfinit les métiers traditionnels de la tech.

Entre révolution et déshumanisation

Ces licenciements massifs soulèvent des questions sur l’avenir du travail dans la tech. D’un côté, l’IA promet des gains de productivité spectaculaires et de nouvelles opportunités. De l’autre, elle érode des emplois traditionnels à un rythme effréné.

La brutalité de certaines approches – employés licenciés pendant leurs vacances chez Microsoft, quadruplement des estimations de licenciements chez Intel – contraste avec les discours bienveillants sur l’innovation technologique.

Pourtant, l’histoire des révolutions technologiques enseigne que les destructions d’emplois s’accompagnent généralement de créations dans d’autres secteurs.

Chez Microsoft, malgré les 15 000 suppressions, l’entreprise recrute massivement des ingénieurs spécialisés en IA avec des salaires de départ pouvant atteindre 300 000 dollars. Amazon, parallèlement aux coupes chez AWS, embauche des milliers de spécialistes en apprentissage automatique. Cette réallocation forcée des talents pourrait, à terme, stimuler l’innovation et créer des emplois plus qualifiés.

Les investissements colossaux – 80 milliards chez Microsoft, 60 milliards chez Google pour 2025 – ne disparaissent pas dans le néant. Ils financent de nouvelles infrastructures, de nouveaux centres de données et, inévitablement, de nouveaux emplois spécialisés. L’économiste Erik Brynjolfsson du Stanford Human-Centered AI Institute rappelle que « every major technological transition initially destroys jobs before creating better ones ».

L’ironie demeure que ces entreprises, qui prêchent l’humanisation de la technologie, appliquent des méthodes parfois brutales dans leur gestion du personnel. Mais cette transition forcée pourrait accélérer l’émergence d’une main-d’œuvre plus adaptée aux défis du 21e siècle.

Cette vague de restructurations marque probablement un tournant historique pour la Silicon Valley. L’ère de la croissance tous azimuts semble révolue, remplacée par une optimisation guidée par l’intelligence artificielle. Si la période de transition s’annonce douloureuse pour des milliers de travailleurs, elle pourrait également ouvrir la voie à une économie technologique plus efficace et, paradoxalement, créatrice d’emplois de meilleure qualité. L’avenir dira si cette transformation forcée aura été un mal nécessaire ou une simple course au profit déguisée en révolution technologique.

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Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier est journaliste pour PiluleRouge.ca. Passionné de politique depuis plus de dix ans, il s'est impliqué à plusieurs reprises sur la scène provinciale. Entrepreneur en informatique, il allie rigueur journalistique et regard critique sur l’actualité. Son approche analytique et son sens de l’humour apportent une perspective unique aux sujets qu’il couvre.

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