Après une autre défaite du Parti Conservateur du Québec, cette fois face à un PQ en pleine ascension, plusieurs chroniqueurs conservateurs ont rejeté du revers de la main l’appel à joindre le camp du Oui de Paul St-Pierre Plamondon.
Plusieurs commentateurs du camp conservateur voient la défaite d’Arthabaska comme une insulte, une campagne de salissage par le PQ. Comme si le fait que le PQ, à la recherche d’un député de plus, avait fait exprès de battre Duhaime pas pour gagner, mais pour empêcher les conservateurs d’obtenir un siège. Bien que je comprenne très bien la frustration de la défaite, je ne crois pas avoir besoin d’expliquer en quoi cette façon de penser victimaire est très ironique venant d’une frange de commentateur se plaignant constamment des subventions aux artistes sous prétexte que « si votre art est bon vous ferez de l’argent ». La même logique s’applique ici, si votre parti politique est bon, vous allez gagner des sièges. Ce n’est pas aux autres partis de vous offrir un siège gratuitement et sans opposition. Les conservateurs, tout comme les autres, n’ont pas à recevoir une « subvention idéologique » sous la forme de sièges au parlement. La démocratie étant le libre marché des idées, la compétition est féroce et si le « produit » proposé ne plaît pas suffisamment à l’électorat, il faut s’adapter.
Maintenant que cela est dit, le Québec se dirige, qu’on le veuille ou non, vers un référendum. Depuis la Révolution tranquille, la politique au Québec suit un cycle assez régulier de questionnement existentiel. Nous avons vécu ce cycle trois fois jusqu’à présent. 1960 à 1980 environ, de 1980 à 1995 et enfin de 1995 à aujourd’hui. Ceci est évidemment une simplification que vous me pardonnerez, je l’espère.
- L’apathie ou la résignation face à la situation : le Canada est perçu comme fonctionnel ou inévitable, les tensions sont au plus bas. La classe politique est donc dominée par des programmes économiques. Pensons à Jean Charest et Philippe Couillard pour notre plus récent cycle.
- Frustration et négociation : les différences entre la nation québécoise et la société canadienne amènent nécessairement des conflits. Les Québécois étant historiquement prudents, ils tentent alors une approche conciliatoire ou de négociation. Pensons aux promesses de François Legault ou encore à Robert Bourassa dans son 2e mandat.
- Polarisation et remise en question : Lorsque les négociations ne fonctionnent pas, la population se retrouve divisée en deux camps. C’est la polarisation, nous sommes pour le Canada ou pour le Québec. S’enclenche alors la bataille pour convaincre les autonomistes et nationalistes, les indécis. Pensons à Jacques Parizeau, René Lévesque et maintenant PSPP.
La lecture est assez simple ici et plusieurs annoncent ce retour de la question nationale depuis belle lurette. N’empêche, les conservateurs devront faire un choix. Être dans le camp du Non, défendre le Canada ou être dans le camp du Oui et défendre l’idée d’un Québec indépendant.
J’entends déjà mes homologues conservateurs s’exclamer « défendre l’état providence, les fonctionnaires, le modèle québécois, etc. » Certes, mais j’aimerais amener le débat ailleurs. Je suis parfaitement d’accord que le modèle économique du Québec est une erreur, que l’entêtement de la classe politique et de la population est nuisible et que nous devrions probablement procéder à un ménage titanesque dans les dépenses. Néanmoins, aussi fou que ça puisse paraître, je crois que ça ne devrait pas être la priorité lors du vote.
Le Canada est un état dont la constitution entraîne le gouvernement fédéral à devenir toujours plus gros, toujours plus gourmand, toujours plus contrôlant. Si vous trouvez ça difficile de réformer un gouvernement obèse au Québec, imaginez tenter de réformer un gouvernement obèse dans un Canada vieillissant et divisé sur des lignes ethniques via l’immigration massive et le multiculturalisme. Qui va voter avec vous pour couper les dépenses?
C’est sans compter le fait que nous l’avons vu pendant la pandémie, la constitution canadienne et la charte des droits et libertés ne valent pas le papier sur lequel elles sont écrites. Un Québec indépendant pourrait véritablement faire mieux, à minima, nous pourrions avoir une constitution plus facile à modifier, car celle du Canada est verrouillée à triple tour. Plusieurs conservateurs, moi inclus, veulent lutter contre le wokisme, mais c’est un combat perdu au sein du Canada. Les peines de prison dérisoires, les peines ajustées selon la race, les chaires de recherches bidons avec des critères d’embauches « diversitaire », tout cela vient du fédéral qui a enchâssé dans sa constitution la discrimination « positive » et le multiculturalisme. Rester dans le Canada, c’est rester dans un pays où le wokisme est littéralement la loi. Si vous croyez que j’exagère, regardez ce qui se passe au Royaume-Uni.
Je sais que pour plusieurs conservateurs, l’économie est le sujet d’importance, mais j’aimerais vraiment que plusieurs regardent plus en profondeur l’importance du système juridique sur notre société. À mon humble avis, le référendum n’est pas tellement une question économique. Nous serons capables de nous en sortir, même Philippe Couillard, le plus gros fédéraliste l’a dit. La question de l’urne est plutôt la suivante : désirons-nous que nos lois soient écrites par d’autres personnes? Plus simplement, faites-vous plus confiance au Canada et ses délires wokes pour écrire les lois dictant ce que vous pouvez faire, dire et consommer? Un gouvernement auquel le Québec n’a que 22 % des sièges, dont une bonne partie est située sur l’île de Montréal, bastion gauchiste. Ou alors, préférez-vous avoir la pleine liberté de construire notre système juridique, nos lois dans un parlement où les conservateurs du Québec pourraient éventuellement avoir la majorité?
Car il ne faut pas oublier une chose. Le Parti Québécois, advenant un référendum gagnant, exploserait probablement avant la fin de son premier mandat. Ce parti fait le grand écart idéologique, un exercice de funambule perpétuel uniquement possible, car le chef peut calmer les troupes en disant « c’est un compromis pour l’indépendance ». Pensez-vous vraiment que Frédéric Bastien et Sylvain Gaudreault auraient été candidats à la chefferie du même parti politique sans la question de l’indépendance? Bien sûr que non! Une fois que le PQ aura disparu, la droite au Québec sera oh combien plus influente, car les membres de droite du PQ, croyez-moi qu’ils sont nombreux, pourront enfin ne plus s’autocensurer au nom de l’indépendance.
D’un point de vue purement égoïste, le mouvement conservateur devrait être dans le camp du Oui. C’est le camp idéologique qui a le plus à gagner. Nos rangs se gonfleraient instantanément et les débats nationaux, qui prennent beaucoup de temps, d’énergie et de capital politique, laisseraient la place à des enjeux économiques. Les gens pourraient critiquer le modèle québécois sans craindre de décrédibiliser le mouvement indépendantiste.
Ainsi, j’invite mes amis conservateurs à se joindre au camp du Oui. Pas pour sauver le monde, mais bien pour avoir une chance de sauver le Québec et d’offrir à nos enfants un état plus fonctionnel, moins envahissant et mettre un coup de hache au wokisme.
