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Les échecs de l’État sont bien pires que les « défaillances du marché »

[Il s’agit d’un article de Germinal du 1er août 2025]

Chaque fois que l’économie connaît un ralentissement, les économistes s’empressent d’en attribuer la cause à une défaillance du marché. Intellectuels dépourvus d’épine dorsale, ils répètent comme des perroquets ce qu’on leur a enseigné dans des manuels rédigés par ceux qui pensent que les individus sont trop stupides pour savoir ce qui est bon pour eux : que le ralentissement économique est dû aux défaillances du marché, et que les marchés échouent précisément parce qu’ils ne sont pas assez réglementés. Voilà le raisonnement que l’on enseigne aujourd’hui en économie, au premier cycle comme aux cycles supérieurs.

Les étudiants en économie et les économistes contemporains ont été conditionnés à croire que l’économie ne peut pas fonctionner correctement si le gouvernement n’intervient pas pour la réglementer. Ils ont été conditionnés à croire que l’économie ne peut pas se rétablir d’elle-même à moins que le gouvernement n’agisse. Pire encore, ils ont été conditionnés à croire que le gouvernement peut être aussi efficace que le secteur privé pour fournir les mêmes biens et services. Cet essai a deux objectifs principaux : (1) les marchés n’échouent pas, ils se recyclent et se restructurent en période de ralentissement économique ; et (2) l’intervention de l’État rend les marchés bien moins efficaces qu’ils ne devraient l’être.

(1) Les marchés n’échouent pas, ils se recyclent & se restructurent

Quand on lit les manuels d’histoire et d’économie, on y explique que les grandes crises économiques et financières qui jalonnent l’histoire seraient l’œuvre d’un capitalisme débridé ; d’un marché sans contrôle ; et d’un laissez-faire excessif nourri par la cupidité humaine. Les manuels soutiennent que si nous connaissons des ralentissements économiques, c’est la faute d’un capitalisme non réglementé, et affirment donc que « l’échec » du capitalisme est responsable de la Grande Dépression, de la Grande Récession, des paniques bancaires du XIXe siècle, de la « décennie perdue » au Japon, etc. Ces crises se seraient produites parce que l’économie n’était pas assez réglementée. Commençons par cette question fondamentale : qu’est-ce qu’une défaillance de marché ?

Selon la définition des manuels d’économie, une défaillance de marché est une situation où le libre marché n’alloue pas les ressources de manière efficiente, entraînant une perte de bien-être économique et social, c’est-à-dire que la demande de biens et services n’égale pas la quantité offerte, conduisant à une distribution inefficace. Les défaillances de marché englobent les externalités (négatives et positives), les biens publics, l’asymétrie d’information, le pouvoir de marché, la tragédie des biens communs et l’inégalité. Les marchés ne sont pas parfaits. Et ils ne le sont pas parce qu’ils sont conduits par des individus imparfaits et faillibles. Chaque fois que l’un de ces facteurs survient, l’État se précipite pour « corriger » le problème. Ce que la plupart des gens ne comprennent pas, c’est que le marché fonctionne comme un processus. Si le marché est un processus, alors les ralentissements économiques ne résultent pas d’un manque de réglementation, mais d’une dynamique de découverte en cours.

Les défaillances de marché sont l’expression d’une découverte entrepreneuriale continue. Les entrepreneurs jouent un rôle central en identifiant et en exploitant des opportunités de profit par l’innovation, l’arbitrage ou une meilleure allocation des ressources. Et ce processus corrige les inefficiences du marché et impulse le progrès économique. La panique de 1907 illustre parfaitement cet argument. Pendant la panique de 1907, des banques en difficulté ont été absorbées par des banques plus grandes et plus efficaces, plutôt que d’être sauvées par l’intervention du gouvernement fédéral. Dans la logique du processus de marché, une entreprise défaillante met à nu des inefficiences, et celles-ci sont traitées lorsque l’entreprise défaillante est rachetée par une entreprise plus grande, plus solide et plus efficiente. Cela crée ensuite un processus de recyclage au sein du marché, puisqu’il élimine les inefficiences et restructure le marché de manière à le rendre à nouveau efficient, avec des acteurs existants qui accumulent de nouvelles ressources pour augmenter la production et la distribution, et de nouveaux entrants prêts à stimuler l’innovation.

Au début des années 1920, lorsque les États-Unis sont entrés dans une récession qui a duré dix-huit mois, au lieu d’utiliser le pouvoir politique pour « réparer » le marché, le président Harding a laissé le marché s’autoréguler en mettant en place des politiques de laissez-faire qui permettaient cette autorégulation, plutôt que des politiques interventionnistes qui l’auraient entravée. Il s’ensuivit une forte croissance de l’économie américaine à la faveur de cette auto-reprise. Comme lors de la panique de 1907, l’économie américaine pendant la récession de 1920-1921 s’est recyclée et restructurée en éliminant les inefficiences du marché représentées par des acteurs défaillants, pour faire place à de meilleurs acteurs disposant des meilleures ressources pour produire des résultats optimaux. Ainsi, les marchés n’échouent pas ; ils se recyclent et se restructurent par un processus entrepreneurial évolutif et perpétuel.

(2) Les défaillances de l’État aggravent les inefficiences du marché

Chaque fois que les marchés « échouent », au lieu d’y voir un processus de découverte en cours, les économistes dominants suggèrent rapidement que l’État devrait « intervenir » pour « sauver » l’économie. Ils pensent que plus un marché est réglementé, mieux il fonctionnera.

Posons d’abord les bases : l’État, en tant que tel et par lui-même, ne crée aucun bien ni service comme le fait le secteur privé à partir de rien. L’État ne crée pas de valeur comme le fait le secteur privé. La seule chose que fait l’État lorsqu’il intervient dans l’économie, c’est réglementer. Ainsi, quand l’État intervient, il perturbe le processus de découverte en déformant les signaux de prix. Cette distorsion rend les biens et services plus chers au lieu d’être abordables. Par exemple, avec le salaire minimum, l’État fixe artificiellement les salaires au-dessus de leur valeur de marché, ce qui crée un surplus de travailleurs non qualifiés sur le marché du travail et conduit donc au chômage, les entreprises étant contraintes de limiter le nombre de personnes qu’elles peuvent se permettre d’embaucher. Ainsi, au lieu de créer des opportunités pour faciliter l’accès à l’emploi des travailleurs, le salaire minimum durcit cet accès, en particulier pour les adolescents considérés comme non qualifiés et inexpérimentés.

Le rôle de l’État dans une économie de marché n’est pas de contrôler l’accès aux ressources économiques, mais de mettre en place des lois qui facilitent l’accès des individus privés aux ressources économiques, comme la protection des droits de propriété, la baisse des frais de licences d’affaires, ou la réduction des barrières à l’entrée dans certaines industries. Le rôle de l’État est d’être un arbitre, un juge qui établit les règles du jeu.

Un autre problème de l’intervention de l’État tient au fait qu’il est devenu un participant actif de l’économie de marché, qui concurrence aussi le secteur privé pour les ressources économiques. Cela crée une situation inéquitable pour les acteurs du marché, car l’État est l’entité qui fait les lois. Il met en place des lois qui le favorisent, à la dépense des acteurs du secteur privé. De plus, l’intervention de l’État crée de la corruption et du copinage, puisqu’il se met à déterminer qui sont les gagnants et qui sont les perdants. Par exemple, pendant la Grande Récession de 2008, le gouvernement américain a décidé quelles banques devaient être sauvées et lesquelles devaient faire faillite. Il a sauvé des banques qui, fondamentalement, méritaient d’échouer, au motif qu’elles étaient « trop grosses pour faire faillite ». Dans un marché non réglementé, ces banques que l’État a supposément sauvées auraient échoué et auraient été absorbées par de meilleures banques, ce qui aurait réinitialisé l’économie et l’aurait rendue plus efficiente pour produire des résultats optimaux.

Les économistes dominants tendent cependant à oublier que l’État est dirigé par des individus imparfaits et faillibles, tout comme dans le secteur privé. Si les défaillances de l’État sont pires que celles du marché, c’est parce que les bureaucrates ne savent pas allouer les ressources comme le font les entrepreneurs. Les entrepreneurs sont mus par la recherche du profit. Ils sont donc contraints d’allouer efficacement les ressources pour dégager un profit. L’État, en revanche, n’est pas mû par le profit, mais par l’expansion du pouvoir politique. Il n’est donc pas « rentable » pour les bureaucrates de rendre les marchés efficients : s’ils le faisaient, ils deviendraient inutiles et leur pouvoir s’étiolerait. Plus un marché connaît d’échecs, plus les bureaucrates se plaisent à imposer des lois et des règlements, car cela renforce et consolide leur pouvoir.

Il est essentiel de comprendre que plus de règlements ne rendent pas les marchés plus efficients. Au contraire, ils les affaiblissent, car la réglementation se concentre sur les interdictions. N’oublions pas que les règlements portent principalement sur ce que les gens ne peuvent pas faire. La réglementation n’habilite pas, elle désincite, car la conséquence du non-respect, c’est la sanction. Cela ne signifie pas qu’il ne devrait pas y avoir de règlementation. Les règlements sont importants et nécessaires, mais leur usage doit être minimal. Ils servent à créer un cadre juridique au sein duquel les acteurs du marché peuvent librement se concurrencer et échanger. La surréglementation ne soutient plus cet objectif ; elle cherche à contrôler ce que les acteurs peuvent ou ne peuvent pas faire. Aujourd’hui, nos économies de marché sont sur-réglementées, et c’est précisément cette surréglementation qui régit nos marchés qui crée les ralentissements économiques que nous connaissons.

Conclusion

Comme mentionné plus haut, les marchés ne sont pas parfaits — et ils n’ont pas à l’être. Ce sont leurs imperfections qui font du processus de marché une découverte entrepreneuriale perpétuelle. Si les marchés étaient parfaits, il ne serait pas nécessaire d’innover en permanence. Les inefficiences du marché sont précisément ce qui ouvre la voie à l’innovation et à l’optimalité de Pareto. Ainsi, lorsque l’État intervient dans l’économie en période de ralentissement, il crée des gains à court terme et des pertes à long terme, car ces règlements ne font que compenser des inefficiences de long terme. Les marchés ne fonctionneront pas comme ils le devraient si on ne les laisse pas tranquilles.

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Germinal G. Van
Germinal G. Van
Germinal G. Van est entrepreneur, auteur primé, économiste et politologue. Vice-président du Parti libertarien de Chicago, il est membre de la National Association of Business Economics et de l’Economic History Association. Né en Côte d’Ivoire, il immigre aux États-Unis en 2010 et obtient des diplômes en sciences politiques, gestion politique et statistiques. Spécialiste de la théorie du choix public, de l’histoire économique et de l’économétrie, il défend l’économie néoclassique et le libéralisme classique. Il a publié plus d’une douzaine d’ouvrages en économie et histoire économique.

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