Mardi, Décembre 9, 2025

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Depuis des années, la nouvelle gauche woke et victimaire a pris le contrôle des débats dans les campus universitaires. Selon Ghislain Benhessa, on peut observer le même phénomène dans les institutions de savoir en France. La classe politique française est très divisée sur cet enjeu délicat et sensible.

Ghislain Benhessa est avocat, essayiste et observateur de la scène politique française.

Entretien

Simon Leduc : Est-ce que les grandes universités françaises sont gangrenées par la gauche woke, palestinienne et anti-Israël?

Ghislain Benhessa : « Tout d’abord, je vais faire un retour dans le passé qui est nécessaire. En France, après le 7 octobre, on a l’impression de découvrir une nouvelle gauche pro-Hamas et pro-Palestine qui a pris de l’influence dans les universités. Ce n’est pas un phénomène nouveau en terre française. Cela fait des décennies qu’une grande partie de l’univers universitaire français, surtout les sciences sociales, diffuse une narration d’une certaine gauche déconstructionniste des années 60 et 70. Cette dernière a tranquillement muté vers une nouvelle gauche woke et pro-Palestine. Il y a 20 ans, j’ai moi-même observé, à l’université, un mouvement progressiste victimaire qui divisait le monde entre dominants et dominés. C’est une dialectique très radicale et binaire des choses. Cette théorie des bons et méchants a muté tranquillement jusqu’à aujourd’hui. Pour cette gauche radicale, il y a deux camps qui s’affrontent, le mal blanc hétérosexuel et la jeunesse qui est sensible aux revendications de toutes les minorités (les transgenres, les Palestiniens, etc.) Pour ce mouvement politique, la Palestine est devenue la nouvelle minorité à la mode. Les Palestiniens sont opprimés par Israël, qui représente le mal incarné, et qui bénéficie du soutien de l’impérialisme américain. Par exemple, le campus de SciencePo a déjà été occupé par des militants pro-palestiniens. Donc, la présence de cette gauche radicale à l’université n’est pas nouvelle. Elle est apparue il y a des décennies et elle est bien présence dans l’espace public français. »

Cette gauche victimaire fait-elle la promotion de ses idées à l’intérieur des universités françaises?

Ghislain Benhessa : « Des militants pro-palestiniens prennent le contrôle des amphithéâtres et disséminent leurs idées dans le milieu universitaire. Cette mouvance radicale est très présente et active dans les sciences sociales. Ses idées se sont facilement répandues dans ces institutions de savoir, car son socle idéologique est présent dans celles-ci depuis longtemps. Pour elle, il y a une lutte des classes entre les dominants (le patriarcat, le sionisme, l’impérialisme américain, l’homme blanc hétérosexuel) et les dominés (les Palestiniens, les LGBT, les féministes, etc.).

En France, l’islamisme radical a pris le contrôle de certaines banlieues françaises. Dans mon pays, il a réellement un problème avec l’islamisme, surtout avec les Frères Musulmans. Les élites françaises sont pro-Palestine et sympathiques à la cause islamiste dans les périphéries. Donc, il y a une conjonction entre l’islamisation des banlieues et les idées pro-islam radical et anti-Israël des mouvements progressistes.

Avant l’attentat terroriste du 7 octobre 2023, cette gauche woke et victimaire demandait déjà aux dirigeants des universités françaises de ne pas inviter des personnes juives et des personnalités conservatrices. C’est une sorte de censure qui touche ceux qui n’adhèrent pas aux idéaux de la gauche diversitaire.   

Alors, ce mouvement de censure était présent dans les universités du pays bien avant le 7 octobre. La réplique israélienne contre le Hamas a accentué et galvanisé ces militants gauchistes anti-État hébreu. On peut observer une montée de l’antisionisme en territoire français. Depuis le 7 octobre 2023, on peut dire que l’antisionisme flirte avec l’antisémitisme.

Il faut savoir qu’une majorité de Français soutient Israël dans son combat contre le Hamas. Tandis que les élites françaises sont plutôt sympathiques à la cause palestinienne. Dans ce débat, on peut constater un fossé idéologique entre le peuple français et ses élites. Cette division est aussi réelle dans plusieurs enjeux politiques en France. »

Comment la classe politique française a réagi face à la montée de cette gauche pro-Palestine?

Ghislain Benhessa : « On retrouve exactement la même partition à l’Assemblée nationale. La gauche a toujours été pro-Palestine. La France insoumise épouse depuis la Nuit des Temps les idéaux de la gauche radicale française, et ce, sans nuances. Cette dernière flirte avec l’électorat islamiste de la France périphérique afin de renforcer son bassin de sympathisants.

Le centre macroniste est très embêté par cet enjeu sensible. Le président Macron tente toujours de trouver un point d’équilibre entre les deux protagonistes. Il change souvent de point de vue entre Israël et la Palestine. Il a déjà soutenu l’État hébreu. Or, le président français appuie maintenant la reconnaissance de l’État palestinien à l’ONU.

Sur le flanc droit, Eric Zemmour et son parti Reconquête sont de fidèles partisans des Israéliens.

D’autre part, historiquement, le Front national de Jean-Marie Le Pen n’était pas pro-Israël. L’ancien leader du FN a fait des déclarations controversées sur le génocide juif lors de la Deuxième Guerre Mondiale. Il a souvent remis en question l’existence des chambres à gaz. Les fondateurs du FN étaient des nostalgiques du Régime de Vichy. Donc, le FN était perçu comme une formation antisémite, d’extrême droite et marqué historiquement par sa proximité avec la Collaboration et ses jours sombres.

Par contre, Marine Le Pen a radicalement changé le point de vue du Rassemblement national sur ce sujet. Ce parti populiste identitaire soutient fortement la cause israélienne contre le Hamas. Marine Le Pen défend ardemment les Juifs de France. Le point tournant fut le fait qu’Arno Klarsfeld voterait pour le RN lors de la prochaine présidentielle s’il affrontait les LFI. Son père Serge Klarsfeld était l’avocat qui a largement œuvré dans la poursuite de criminels de guerre nazis. Son fils est un avocat très connu du grand public. Lui et son père ont clairement dit qu’ils voteraient pour Marine Le Pen au second d’une présidentielle l’opposant à Jean-Luc Mélenchon. Une partie des Juifs de France a remercié Marine Le Pen et le RN pour leur soutien à la cause juive. Donc, le cordon historique de séparation entre le RN et les Juifs français a disparu. Le RN est devenu un parti pro-juif et on ne peut clairement pu l’étiqueter d’extrême droite. »

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Simon Leduc
Simon Leduc
Titulaire d'un Baccalauréat en science politique a l'Université de Montréal. Il est chroniqueur et journaliste pour Libre Média, le Podcast Ian et Frank et de Québec Nouvelles. Vous pouvez le suivre sur Facebook.

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