Mercredi, mars 12, 2025

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Northvolt au Québec : l’échec de l’interventionnisme

Le rêve québécois de devenir un champion mondial de la batterie électrique montre des signes inquiétants d’essoufflement. Northvolt, ce fleuron suédois qui devait révolutionner l’industrie avec « les batteries les plus vertes au monde », se trouve aujourd’hui au bord du précipice financier, entraînant avec lui des milliards de dollars de fonds publics.

En septembre 2023, c’était l’euphorie. Le premier ministre François Legault et son homologue fédéral Justin Trudeau annonçaient fièrement l’arrivée de Northvolt à Saint-Basile-le-Grand et McMasterville. Un investissement colossal de 7 milliards $, « le plus important investissement privé de l’histoire récente du Québec », selon les mots de M. Legault – bien qu’il s’agisse ici de 7 milliards de fonds publics.

Mais voilà qu’à peine 15 mois plus tard, la maison-mère suédoise s’est placée sous la protection du chapitre 11 de la loi sur les faillites aux États-Unis. Et pendant ce temps, les contribuables québécois et canadiens restent sur la sellette.

Des milliards de fonds publics en jeu

L’ardoise est salée. Le gouvernement du Québec a déjà injecté 710 millions $ dans l’aventure, dont 240 millions $ en prêt garanti pour l’achat du terrain, 270 millions $ investis directement dans la société mère en Suède, et 200 millions $ via la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Charles Emond, PDG de la Caisse, a d’ailleurs confirmé hier que la valeur de ce prêt de 200 millions $ a été ramenée à zéro. « Est-ce que le projet est mort au Québec? Ça reste à voir, ça sera complexe », a-t-il admis, tentant de se consoler en précisant que « au moins le cash de la Caisse est au Québec. »

Au total, Ottawa et Québec se sont engagés à verser jusqu’à 2,7 milliards $ en capital et 4,6 milliards $ en subventions à la production. Une manne qui pourrait bien s’évaporer dans les méandres de la restructuration financière de l’entreprise.

Un marché qui s’essouffle, des promesses qui s’envolent

Présenté initialement comme un projet qui créerait jusqu’à 3 000 emplois directs et contribuerait jusqu’à 1,6 milliard $ au PIB annuellement, Northvolt fait désormais face à un marché des véhicules électriques en ralentissement et à une concurrence féroce des fabricants chinois et sud-coréens.

« Je pense que le principal problème était que le gouvernement n’a pas présenté ce projet pour ce qu’il est, c’est-à-dire un investissement risqué », explique Normand Mousseau, directeur scientifique de l’institut d’énergie Trottier à Polytechnique Montréal. « Ce projet a été présenté comme une affaire conclue. »

La réalité est tout autre. Le projet, initialement prévu pour démarrer sa production en 2026, accuse maintenant un retard d’au moins 12 mois, repoussant le lancement à 2027 ou 2028. Et les 354 mégawatts d’électricité réservés par Hydro-Québec pour l’usine pourraient bien rester inutilisés pendant des années.

Le coût de l’interventionnisme économique

Cette débâcle soulève des questions fondamentales sur la pertinence des politiques industrielles interventionnistes. Selon un sondage MEI-Ipsos, 63 % des Canadiens estiment que le gouvernement fédéral dépense trop, et 70 % considèrent qu’Ottawa ne gère pas bien son argent.

« Quand on veut se développer, il faut prendre des risques calculés. Sinon, on n’avance pas », s’était défendu François Legault à l’Assemblée nationale. Un point de vue qu’y est alarmant à bien des égards surtout selon le plus récent bilan du Centre sur la productivité et la prospérité.

L’interventionnisme économique du gouvernement du Québec a été un désastre avéré pour la productivité et la prospérité de la province. En dépit des milliards de dollars injectés dans la politique industrielle au cours des 25 dernières années, le gouvernement n’a pas réussi à enrayer le déclin économique du Québec. Pire, il continue à interférer dans la réallocation des ressources en soutenant artificiellement des entreprises peu productives, empêchant ainsi une croissance économique saine. Résultat ? Le Québec est largement en retard sur la moyenne des pays développés, avec un niveau de vie inférieur de 16 024 $ par habitant à celui des économies occidentales comparables​.

L’interventionnisme a également engendré un marché du travail sclérosé et une faible productivité des entreprises québécoises. Plutôt que d’investir dans l’innovation et l’amélioration des infrastructures productives, les entreprises ont été maintenues à flot par des aides publiques inefficaces. La croissance annuelle moyenne de la productivité du travail au Québec entre 1981 et 2022 n’a été que de 1,01 %, contre 1,55 % en moyenne pour les pays comparables. Cet écart est directement responsable de la stagnation du niveau de vie québécois, qui n’a cessé de se creuser par rapport aux autres économies avancées. Le constat est sans appel : à force de vouloir tout contrôler, l’État québécois a étouffé l’innovation et la concurrence.

Un avertissement pour l’avenir

Cette saga nous rappelle que lorsque les gouvernements tentent de « choisir les gagnants » sur le marché, ce sont souvent les contribuables qui finissent par assumer les risques. Une leçon coûteuse qui devrait inciter à plus de prudence avant de s’engager dans de futures interventions économiques.

En attendant, les Québécois regardent avec inquiétude ce projet qui devait être la fierté de leur économie verte, mais qui risque de devenir le symbole d’un interventionnisme économique aux pieds d’argile.

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Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier
Maxym Perron-Tellier est journaliste pour PiluleRouge.ca. Passionné de politique depuis plus de dix ans, il s'est impliqué à plusieurs reprises sur la scène provinciale. Entrepreneur en informatique, il allie rigueur journalistique et regard critique sur l’actualité. Son approche analytique et son sens de l’humour apportent une perspective unique aux sujets qu’il couvre.

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