IAN SÉNÉCHAL | Depuis quelques jours, une nouvelle campagne de peur semble prendre forme dans les médias québécois. Portée par André Noël, un journaliste indépendant, et relayée par des figures comme Alexandre Boulerice et Olivier Niquet, cette saga autour du « Projet 2025 » et de l’Institut économique de Montréal (IEDM) est un exemple frappant de ce qu’on pourrait appeler le « conspirationnisme de gauche ».
Une campagne politique recyclée
Le Projet 2025, décrit comme un plan supposément dangereux et autoritaire lié à la droite radicale, n’est en réalité qu’un thème politique utilisé par les démocrates américains lors de leur campagne présidentielle perdante en 2024. Recyclé par certains milieux progressistes québécois, ce narratif semble viser à diaboliser des acteurs comme l’IEDM, sous prétexte de leur affiliation avec des organisations internationales comme le réseau Atlas ou The Heritage Foundation.
Mais ce discours rappelle étrangement une théorie bien connue de certains gens de droite : celle qui associe Klaus Schwab, le Forum économique mondial (WEF) et un prétendu « Great Reset » orchestré dans l’ombre. La mécanique est la même : un amalgame de faits décontextualisés, des affiliations gonflées hors de proportion, et un soupçon d’autoritarisme imaginaire pour effrayer le public.
La peur comme arme politique
Le discours d’André Noël, relayé à une conférence, insiste sur des liens « inquiétants » entre l’IEDM, The Heritage Foundation et le réseau Atlas. Pourtant, les associations entre think tanks sont monnaie courante dans le monde des idées, qu’elles soient de gauche ou de droite. Peindre ces liens comme une cabale mondiale revient à jouer exactement la même partition que ceux qui imaginent Schwab en chef d’orchestre d’un complot visant à contrôler l’humanité.
Le parallèle est flagrant : là où la droite évoque des « élites mondiales » qui veulent détruire nos libertés, Noël et ses alliés dénoncent une « droite radicale » qui planifierait en coulisses un coup d’État idéologique. Dans les deux cas, ces récits ne reposent que sur des peurs alimentées par des raccourcis intellectuels.
Quand les médias et les syndicats s’en mêlent
Ce qui est troublant, c’est la caution accordée par des institutions influentes comme les syndicats et des médias de masse. En offrant une tribune à ces théories fumeuses, ils donnent une crédibilité injustifiée à des accusations qui relèvent davantage de la propagande partisane que de l’enquête journalistique.
L’IEDM est ouvert sur ses affiliations avec le réseau Atlas et d’autres institutions partageant une vision économique basée sur le libre marché. Rien n’indique un quelconque agenda autoritaire ou radical. Pourtant, Noël, Boulerice et Niquet jouent sur la peur, en évoquant des « privatisations », des « dénis climatiques » et des « plans secrets » comme s’il s’agissait de vérités avérées.
Une « peur à gauche » qui divise
Ce conspirationnisme version progressiste n’a qu’un but : polariser encore davantage le débat public. En pointant du doigt des organisations et des individus, on détourne l’attention des vrais enjeux sociaux et économiques. Plus grave encore, ce discours entretient une méfiance envers tout ce qui n’épouse pas les idéaux d’une certaine gauche syndicaliste et écologiste.
Une conclusion inquiétante
Qu’on le veuille ou non, les théories du complot, qu’elles viennent de la droite ou de la gauche, sont un poison pour la démocratie. Plutôt que de sombrer dans la caricature et les accusations sans fondement, il est temps de ramener le débat à des faits concrets et vérifiables. En attendant, cette tentative de diabolisation du Projet 2025 et de l’IEDM n’est rien de plus qu’une stratégie polarisante déguisée en enquête journalistique.
Car comme l’a si bien résumé Daniel Dufort, président de l’IEDM : «L’idée voulant que l’IEDM soit liée au Projet 2025 est tout simplement fausse. »