Dans une circonscription où chaque vote compte littéralement, le Bloc Québécois a officiellement déposé une contestation en Cour supérieure du Québec pour annuler les résultats de l’élection fédérale dans Terrebonne. La raison? Une erreur d’Élections Canada qui a privé une électrice bloquiste de son droit de vote, dans une course remportée par la libérale Tatiana Auguste avec… une seule voix.
Un parcours électoral digne des montagnes russes
L’histoire de Terrebonne ressemble à un scénario de film politique. Initialement, la libérale Tatiana Auguste était déclarée gagnante avec 35 voix d’avance. Puis, après le processus de validation post-électoral, c’est la bloquiste sortante Nathalie Sinclair-Desgagné qui prenait les devants avec 44 voix. Finalement, un dépouillement judiciaire complété le 10 mai a confirmé la victoire d’Auguste par un seul vote : 23 352 contre 23 351.
L’erreur fatale d’Élections Canada
Au cœur de la contestation se trouve une erreur administrative préoccupante dans un contexte électoral aussi serré. Une électrice de Terrebonne, Emmanuelle Bossé, avait envoyé son bulletin de vote par la poste en avril, utilisant l’enveloppe fournie par Élections Canada. Problème : l’adresse était incorrecte, et Postes Canada a retourné l’enveloppe à l’expéditrice quelques semaines plus tard.
Élections Canada a admis que « une erreur a été commise sur l’étiquette destinée à l’enveloppe de bulletin de vote spécial à retourner au bureau local d’Élections Canada. » Le bulletin de vote en question était celui d’une électrice du Bloc Québécois. Dans une course aussi serrée, cette erreur devient cruciale.
Le chef bloquiste Yves-François Blanchet n’a pas mâché ses mots : « La juge a dit qu’on avait perdu par un vote. Le vote qui aurait créé l’égalité est apparu dans la main d’une citoyenne. Il y a donc une irrégularité difficilement contestable qui, en fonction de la loi, demande que l’élection soit reprise. ». Il a qualifié cela de « situation précise, historique et sans précédent ».
Un problème plus large qu’anticipé
Le Bloc soutient que cette démarche dépasse la simple contestation électorale. Avec les libéraux qui détiennent actuellement 170 sièges — soit deux de moins que la majorité absolue de 172 — chaque député compte dans ce Parlement minoritaire.
Comme si l’affaire n’était pas assez compliquée, Élections Canada a révélé que cinq autres bulletins de vote par correspondance ont été reçus en retard au bureau local, « malgré une erreur de code postal sur l’enveloppe de retour ». L’agence précise toutefois que « aucune information ne permet de déterminer si le retard a été causé par le code postal erroné ».
Au total, 16 bulletins n’ont jamais été reçus, incluant celui de l’électrice qui a initialement signalé le problème.
Les prochaines étapes juridiques
La contestation s’appuie sur l’article 524(1) de la Loi électorale du Canada, qui permet à tout candidat de contester un résultat en invoquant une irrégularité susceptible d’avoir influencé l’issue du scrutin. Si la Cour supérieure donne raison au Bloc, elle ordonnera l’annulation du scrutin et la tenue d’une nouvelle élection.
Le Parti libéral pourrait toutefois faire appel de cette décision en Cour suprême. Cela prolongerait ainsi l’incertitude dans cette circonscription qui aura vécu plus de rebondissements qu’un téléroman québécois.
Une leçon de démocratie
Dans cette circonscription de la couronne nord de Montréal, les électeurs pourraient bien être rappelés aux urnes pour départager définitivement leurs représentants. Une situation qui rappelle que dans une démocratie, parfois, c’est vraiment chaque vote qui compte.