Mardi, juillet 8, 2025

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Duplessis, Casgrain et le droit de vote : paradoxes d’une époque

J’ai commencé à lire la biographie de Maurice Duplessis écrite par Conrad Black. On en dit que c’est complaisant et qu’il faut prendre ça avec des pincettes, mais y’aura assurément des pépites intéressantes dans cet ouvrage quand même colossal de plus de 1 000 pages.

J’en suis au moment où Duplessis n’est pas encore Le Cheuf, mais le simple député des Trois-Rivières. Il est extrêmement actif en Chambre et a l’habitude de répondre à toutes les correspondances adressées à son bureau de comté, avec l’aide de sa fidèle secrétaire qui fera plus de 30 ans à ses côtés, Auréa Cloutier.

Il a notamment entretenu une riche correspondance avec la grande Thérèse Casgrain qui, à l’époque, militait pour l’obtention du droit de vote pour les femmes. Homme de son temps, Duplessis soufflait le chaud et le froid dans ses réponses.

Dans l’une de ses lettres, Casgrain lui demande directement s’il voterait favorablement pour un projet de loi octroyant ce droit fondamental. Politicien, il répondra :

« Je donnerai un vote consciencieux, juste, et conforme au désir de la population que j’ai l’honneur de représenter et aux intérêts de la Province en général. »

Plus flou que ça, tu meurres.

En 1931, un premier projet de loi en ce sens est déposé en Chambre au Québec. Il se fait battre par une majorité écrasante qui inclut notamment le premier ministre Taschereau et tout son gouvernement en plus de, on s’en doute, Maurice Duplessis. C’était probablement ça, le « vote consciencieux ».

Toutefois, il y avait quand même un certain fond (modeste) d’égalité des genres en Duplessis puisque peu après, il déposa lui-même un projet de loi en vue de permettre aux femmes d’accéder au Barreau et de devenir avocates. Il en dira qu’il était injuste de « donner aux femmes une éducation pour ensuite les priver du droit de s’en servir ».

C’est quand même paradoxal comme position considérant qu’à ses yeux, une femme éduquée était assez brillante pour se frotter aux tribunaux, mais pas assez pour exercer un droit de vote libre et éclairé.

M’enfin, la suite des choses aura heureusement donné raison aux militantes féministes et le droit de vote aura été accordé aux femmes le 25 avril 1940. Dans une société aussi conservatrice que le Québec de l’époque, c’était exceptionnel.

Un an plus tard, on retrouve un article pour célébrer cette victoire dans les pages de La Presse. Une photo, que je reprends ici, montre le groupe de militantes du Conseil de la Ligue pour les Droits de la Femme réuni pour fêter l’anniversaire d’un an du droit de vote. C’est super le fun!

Duplessis, Casgrain et le droit de vote : paradoxes d’une époque

Sauf que dans la vignette que vous pouvez lire en zoomant, plus de la moitié des femmes sont identifiées en relation avec leur mari. Certaines utilisaient leurs noms de naissance, mais probablement que c’étaient des célibataires ou qu’elles n’étaient pas encore mariées.

Par exemple, ce n’est pas Thérèse Casgrain, mais bien madame Pierre-F. Casgrain qu’on peut lire sous la photo. L’une des plus grandes militantes féministes du Québec ne méritait pas de voir son nom propre à elle sous l’article célébrant sa victoire historique!

C’était quand même d’une débilité profonde de faire ça, mais pour l’époque, c’était ça la coutume. Disons que les choses ont beaucoup évolué depuis et c’est tant mieux.

C’est tentant de faire du révisionnisme en lisant des vieux livres poussiéreux, mais je suis plutôt du camp de ceux qui préfèrent célébrer le fait que notre société n’est plus celle qu’elle était. Les générations futures se diront probablement la même chose de nous et c’est bien ça l’ordre normal des choses.

Se voiler la face quant à notre passé n’appellera qu’à répéter les mêmes erreurs.

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David Chabot
David Chabot
David Chabot, professionnel des relations publiques et de la gestion politique, a d’abord été restaurateur avant de se réorienter vers la politique municipale, sa passion. Aujourd’hui Chef des communications et Directeur du bureau du président d’une grande entreprise immobilière, il collabore avec des décideurs politiques et économiques. Titulaire d’un baccalauréat en science politique, il complète une maîtrise en affaires publiques et un MBA en gestion immobilière à l’Université Laval. Pragmatique et stratège, il excelle en négociation, planification et influence.

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